COVID- 19 et Algérie : par peur, les malades ne fréquentent plus les hôpitaux


INVITE : signé Professeur Mansour Brouri, Médecine Interne, Médecine Vasculaire, Fondateur de la Société Algérienne de Médecine Vasciare (SAMEV) , Alger
 

"L'infarctus, le cancer, la lèpre ? J'ai peur d'une autre maladie : l'insignifiance" 
Anatole Bisk, dit Alain Bosquet 


Texte élaboré à partir d'une interview par Nissa Hammadi , pour le journal LIBERTE le13/04/2020,  ,http://www.liberte-algerie.com/actualite/par-peur-les-malades-ne-frequentent-plus-les-hopitaux-337389)

Le professeur Brouri affirme que beaucoup de patients souffrant de pathologies lourdes ont déserté les hopitaux de crainte d’une contamination par le coronavirus, au point de justifier l’arrêt de l’activité de certains services. Pour rassurer malades et personnel médical, il préconise de “préparer des hôpitaux exclusivement dédiés à la prise en charge des personnes atteintes par le Covid-19, au moins dans un premier temps, dans certaines grandes villes”.

 Liberté : Dans cette conjoncture focalisée sur la lutte contre la pandémie Covid-19, qu’en est-il de la prise en charge des malades chroniques ?
 Pr Mansour Brouri : Ce problème est soulevé par tous les professionels de santé un peu           partout dans le monde. En France, on s'est rendu compte que le nombre d'AVC admis dans les centres spécialisés de référence a diminué de 50%. Le même constat est fait pour toutes les urgences graves. Il y a quelques jours, j'ai demandé au Pr Nibouche, chef du service de cardiologie au CHU Parnet, s'il a constaté ces changements dans son service. Eh bien les chiffres qu'il m'a donnés confirment le constat fait par tout le monde: 123 syndromes coronariens aigus en janvier, 116 en février, et 56 seulement en mars. C'est plus de 50% en moins.

Liberté : Que sont devenus ces malades qu'on ne reçoit plus ?
Pr Mansour Brouri : Il est difficile de penser que brutalement l'incidence de ces graves maladies a diminué de plus de moitié, alors qu'on s'attendrait, au contraire, en situation de stress, comme celle que nous sommes en train de vivre, à une aggravation.
 Cela peut s'expliquer par plusieurs facteurs/
* Certains chefs de service, pris de panique, ont réagi en fermant carrément l'accès à leurs services ; d'autres l'ont fait par crainte de contamination des malades habituels, chroniques.

* Les malades eux-mêmes ont décidé, par précaution, de ne plus fréquenter les hôpitaux. On a vu le nombre de malades diminuer très rapidement jusqu'à justifier l’arrêt de l'activité. 
* Ce sentiment de peur a été aggravé par l'hospitalisation des personnes atteintes par le Covid-19, dans les mêmes services à côté des malades habituels, même si cela s'est fait dans une aile séparée, car il s'agit souvent de malades chroniques qui se savent fragiles et surtout les plus exposés ; surtout qu'on a entendu certains responsables locaux déclarer, dans un premier temps, qu'un lit est réservé à cette infection dans chaque service. D’autres ont parlé de 10 lits réservés dans chaque service, avant qu'on ne crée des unités bien individualisées, mais toujours en intra-service ; ce qui pose toujours problème pour les malades.
* Pour rassurer tout le monde, malades et personnels soignants, je pense qu'on aurait du préparer des hôpitaux exclusivement dédiés à la prise en charge des personnes atteintes par le Covid-19, au moins dans un premier temps dans certaines grandes villes. Cela est posible, en transférant certaines activités habituelles à d'autres établissements


* Ce n'est pas trop tard, au moins pour centraliser les urgences en cas d'aggravation de la situation. D'ailleurs, l'hospitalisation de plusieurs agents de sécurité, contaminés dans un hôpital d'Alger a donné raison à ces personnels paramédicaux, qui ont réagi contre ce type de regroupement à très haut risque décidé par leur chef de service. Que sont devenus tous ces malades qui ont boudé nos services durant cette période ? Seule une enquête pourra répondre à la question. En attendant, il faudra rassurer les familles et les malades pour qu’ils prennent contact d’abord par téléphone pour demander des rendez-vous dans les différents services où la continuité des soins est et doit être assurée dans tous les cas.

Liberté : Quelles conséquences pourraient découler de cette situation ?
Pr Mansour Brouri : On peut craindre de voir beaucoup de maladies s’aggraver faute de continuité de soins ou de prise en charge dans les délais. Un cancer nouvellement diagnostiqué ne peut pas attendre 1 à 2 mois pour être opéré. C’est une perte de chance inacceptable. Ce sera le cas pour beaucoup de nos malades chroniques. Il est urgent de sécuriser tout le circuit de prise en charge et de rassurer les malades... Tout dépendra de la sévérité et du nombre de malades Covid-19 à prendre en charge. Si nous ne sommes pas débordés, la reprise en main peut se faire avec une bonne réorganisation du fonctionnement de nos structures hospitalières, par la bonne séparation des activités Covid-19, en sécurisant les accès à l’une et à l’autre des activités. En veillant à ne pas exposer inutilement tous ceux qui peuvent l’être. Je pense qu’on n’a pas à exposer nos chirurgiens dentistes, ORL, ophtalmologues et chirurgiens toutes spécialités confondues pour des actes qui peuvent être différés, sans caractère d’urgence. On peut se contenter de se limiter pendant 3 à 4 mois à des activités d’urgence avec une bonne information de tout le monde, sans stigmatiser nos professionnels et en offrant tous les moyens de protection et les conditions de sécurité pour tous.

Des formations pour se prémunir des risques de contamination doivent être assurées régulièrement pour tous les personnels de santé mais aussi et surtout pour les personnels de soutien comme les agents et les femmes de ménage qui ne sont pas sensibilisés et informés des risques qu’ils encourent et qu’ils font courir à leurs proches au retour au foyer.
Nous faisons face à une situation nouvelle et à très haut risque. Tout le monde doit en prendre conscience et être rappelé à l’ordre tout le temps. Des précautions et de nouveaux gestes doivent être adoptés tous les jours, de l’entrée dans le service, pendant toute l’activité et à la sortie. Toutes ces mesures doivent être rappelées à chaque étape

Merci au Professeur Brouri, une vision toujours juste des situations médicales
Le prolème exposé , nous l'avons en France, les patients ne consultent plus alors qu'ils doivent êtressuivis, le plus souvent par peur d'être contaminé.

Remarque :  je viens de faire un sondage sur TWEETER, diminution de suivis médicaux, réponses Pour 50% c'est 50% des patients  pour 30% c'est 75% des patients !!!!!

RAPPEL : #1 MASQUE POURTOUS