Pascal Giordana
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Entretien avec Pascal Giordana : écho-Doppler et hémodialyse
iconographie : FAV
“Enseigner, c’est apprendre deux fois.”Joseph Joubert
“Peindre, c’est faire apparaître une image qui n’est pas celle de l’apparence naturelle des choses, mais qui a la force de la réalité.”Raoul DufyCet entretien avec Pascal Giordana est destiné aux médecins pratiquants ce type d’examen, donc former pour cette indication et travaillant en collaboration avec un centre d’hémodialyse. L'écho-Doppler des FAV en hémodialyse, s'apprend mais ne s'improvise pas.
Dr Pascal Giordana
Médecin Vasculaire à l’hôpital Pasteur du CHU de Nice
Service de Médecine Vasculaire : Professeur Georges LEFTHERIOTIS
Trésorier de la Société Française de Médecine Vasculaire
Responsable de l'Unité de Lymphologie du CHU de Nice
Co Auteur des standards de qualité de l'écho-Doppler des FAV pour l'hémodialyse (work in progress)
L'écho Doppler avant la création d’une fistule artério veineuse (FAV)
Quels sont les éléments cliniques à rechercher avant la réalisation de l’écho DopplerL’examen clinique est important, tout aussi que la recherche d’antécédents locaux du type de perfusions, pace maker, thromboses veineuses du membre supérieur. On va bien sûr rechercher une cicatrice, analyser la circulation veineuse superficielle, rechercher une induration. On va demander au patient si il y a des difficultés à la piquer pour les prises de sang.
L’examen artériel consiste à analyser la couleur des téguments, le temps de recoloration après vitro-pression. On recherche les pouls, on réalise une manœuvre d'Allen. On réalise une auscultation afin de rechercher un souffle vasculaire. On recherche une claudication des membres supérieurs et évidemment la prise de tension artérielle au niveau des deux membres supérieurs.
Enfin il faut savoir quel est le bras utilisé par le patient et s’il présente des vertiges ou une instabilité (hypoperfusion vertébrale ?).
Signé Michel Dauzat
La réalisation de l'écho-Doppler réalise une cartographie de l’anatomie artérielle et veineuse du membre supérieur : qu’est ce qui est le plus important à étudier. Quels sont les diamètres des veines autorisant la FAV ?La cartographie est réalisée dans une pièce chauffée afin d’obtenir un diamètre interne veineux maximal. Le patient ou la patiente est torse nu ou avec seulement un soutien-gorge.
Le réseau artériel et veineux sont étudiés dans leur totalité.
On vérifie la liberté du réseau veineux superficiel, la souplesse des veines. On recherche des volumineuses collatérales ou perforantes.
Le calibre minimal pour une veine utilisable pour une fistule est de 3 mm. On peut avoir recours à ue garrot afin d’augmenter la pression veineuse et donc d’observer une dilatation veineuse.
Que recherche-t-on sur le plan artériel ?Au niveau artériel, on recherche une sténose, on analyse la paroi artérielle et notamment l’importance des calcifications. Au niveau proximal on dépiste les divisions hautes au niveau du tiers proximal du bras. Au niveau distal on analyse les flux des artères radiales et ulnaires, ainsi que l’arcade palmaire. On peut être amené à faire une analyse des pressions digitales en cas de doute. Enfin je réalise systématiquement une analyse écho-Doppler des troncs supra-aortiques et notamment des artères vertébrales.
Une fois la FAV créée, tu réalises un examen écho Doppler combien de temps après la création de la FAV. Que notes-tu et fais-tu une cartographie photographique avant utilisation de cette FAV et pourquoi ?
Signé Michel DauzatNous avons pour habitude de réaliser un contrôle écho-Doppler à 6/8 semaines qui est la date estimée pour une bonne maturation de la fistule. Nos chirurgiens aiment à réaliser des anastomoses termino-latérale avec un branchement direct de l’artère radiale sur la face latérale de la veine céphalique anté-brachiale lorsque ceci est possible. Il semblerait que les contraintes pariétales veineuses soient moindres et que les complications dans le suivi le soient aussi. Dans ce cas, nous mesurons le diamètre de l’artère radiale 1 cm en amont de l’anastomose, la vitesse maximale au niveau de l’artère radiale à ce niveau. Nous mesurons le diamètre de l’anastomose, le diamètre de la veine de drainage à 3 cm en aval de l’anastomose. Puis nous réalisons une analyse de la veine de drainage à la recherche d’anomalie et on mesure le plus grand diamètre et la profondeur de la veine.
Pour les autres types de fistules, on analyse le versant veineux entièrement et nous mesurons le plus grand diamètre interne et la profondeur de la veine.
Dans tous les cas, nous mesurons le débit de la fistule au niveau de l’artère brachiale. Il est compris entre 500 et 800 mL/min pour les fistules distales et entre 800 et 1 200 mL/min pour les fistules proximales.
Nous ne faisons pas de cartographie photographique systématique, sauf anomalies.
Si la FAV est bien fonctionnelle, envisages tu un rythme de contrôle écho Doppler de la FAV de manière systématiqueNon, nous n’avons pas de suivi systématique, les contrôles sont organisés en fonction des difficultés de dialyse, des anomalies de pression… C’est la clinique qui prédomine.
Baisse de débit de la FAV, pourquoi et quelles sont les causes ?
Les baisses de débit sont d’origine artérielle ou veineuse ou générale.
Je passe vite sur les causes générales et notamment cardiaque chez ces patients à haut risque.
Les causes artérielles sont essentiellement les sténoses qui peuvent être anastomotiques mais aussi en amont voire proximales. Dans ce cas, la veine est souple, elle se vidange rapidement et facilement lors qu’on surélève le membre supérieur. On sent un thrill sur le trajet artériel et l’écho-Doppler exhaustif de l’arbre artériel nous permet de confirmer cette sténose.
Les hypodébits veineuxsont en rapport avec des sténoses veineuses particulièrement au niveau des points de ponction et des thromboses. Là, la veine est rénitente, difficile à comprimer. La vidange est difficile. On perçoit un thrill au niveau de la sténose et la veine est souple en aval. On peut entendre un souffle sous clavier en cas de sténose proximale ou distale selon. En cas de thrombose la veine est dure, incompressible. L’écho-Doppler est ici aussi exhaustif et confirme le diagnostic et permet aussi d’identifier d’autres lésions moindres associées.
Comment met-on en évidence un vol de la FAV au niveau de la main, clinique et écho Doppler ?
Le vol vasculaire distal en rapport avec la FAV a, à mon avis, une importance clinique. On peut avoir une pâleur cutanée distale (doigts, paume de la main), des fourmillements au niveau des doigts, une faiblesse de la main à l’effort, des douleurs distales lors de la réalisation de la dialyse voire, des lésions nécrotiques des extrémités.
L’écho-doppler va retrouver un bon débit de la fistule et des flux amortis voire inversés au niveau de l’arcade palmaire. Là aussi la mesure de la pression digitale peut avoir un intérêt.
Quelle est la ou les causes des hyperdébits d’une FAV pour hémodialyse ?
L’hyperdébit est défini par un débit supérieur à 1,5 L/min. Cet hyperdébit est conditionné par le diamètre de l’anastomose, la souplesse des axes vasculaire et leur facilité à se dilater, tout d’abord au niveau artériel puis au niveau veineux ce qui entraîne une diminution des résistances. A terme, l’hyperdébit va avoir des répercussions cardiaques (hypertrophie ventriculaire, insuffisance cardiaque).
CARTE BLANCHE : deux mots des FAV PERCUTANEE : avantages et inconvénients
https://ebulletin.radiologie.fr/e-quotidien-jfr-lundi/creation-fistule-arterioveineuse-dhemodialyse-voie-percutanee-systeme-ellipsysNous n’avons pas encore d’expérience en ce qui concerne cette technique, mais notre centre va être investigateur dans une étude prochaine. Peu de séries et surtout de petites séries. Il existe deux systèmes de ponction percutanée qui sont réalisés sous contrôle échographique. Ils sont positionnés au niveau du pli du coude. L’un consiste en une transfixion artério-veineuse directe, l’autre utilise une perforante du plis du coude. L’analyse échographique de cette zone est primordiale avec un bonne connaissance anatomique. La deuxième technique fait intervenir le réseau veineux profond et peut nécessiter une embolisation veineuse distale associée en cas de reflux veineux distal.
Il semblerait que ces techniques soient utiles en cas de nécessité de réalisation d’un abord en urgence chez des sujets au capital veineux superficiel pauvre. Ce serait une technique de deuxième intension.
Merci Pascal pour tes réponses claires. Il faut insister sur la proximité nécessaire entre le néphrologue, le médecin vasculaire et le chirurgien vasculaire, un travail d'équipe nécessaire et indispensable.
Une synthèse par Michel Dauzat