Des clés pour apprendre son métier d'élève
« Etre élève, c’est le premier métier du monde » La Borderie
« L’apprentissage ne peut pas être une sorte de fleuve chaotiqu où les élèves seraient emportés et passeraient d’une étape à l’autresans comprendre ce qui leur arrive » Philippe Meirieu
Avec la fermeture des établissements scolaires le 16 mars dernier, le Ministre de l’Éducation nationale a annoncé la mise en place d’une continuité pédagogique à distance, à l’aide de plate-formes numériques. La crise du coronavirus a révélé au grand jour les atouts mais aussi les fragilités de la continuité pédagogique en ligne. Cette situation inédite et brutale a vu émerger un un bon nombre d’interrogations. La question cruciale est la suivante : comment accompagner et encadrer les dispositifs pour que chaque élève puisse progresser et ne soit pas laissé au bord du chemin ? Des éléments de réponse ont déjà été apportés dans un article sur https://medvasc.info/
Dans cet article, nous posons le focus sur les élèves. Pour assurer la continuité pédagogique, les élèves sont-ils tous équipés à la maison ? Au delà des problèmes matériels, comment les élèves vivent-ils « l'école à la maison » ? Quelle première leçon en tirer ?
1. Une continuité pédagogique en ligne ni uniforme, ni linéaire :
L’Éducation nationale et les collectivités locales ont développé des espaces numériques de travail (ENT) à travers le territoire. S'ils ont été développés au niveau des écoles, ils offrent des services numériques pour la communauté éducative d'une ou plusieurs écoles ou d'un ou plusieurs établissements scolaires dans un cadre de confiance. L'ENT offre des services pédagogiques (cahier de texte numérique, espaces de travail et de stockage communs aux élèves et aux enseignants, outils collaboratifs, blogs, forum, classe virtuelle, etc, des services d'accompagnement à la vie scolaire et permet d'établir la communication. (messagerie, informations des personnels et des familles, visioconférence etc.).
Le laboratoire de la société numérique a mené une étude en 2019 sur l'accès au numérique des Français et couverture territoriale. (Cf lien). Nous pouvons noter que l’équipement informatique constitue la première des fractures qui chiffre à 77% les familles possédant au moins un ordinateur. Le Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie (Crédoc) confirme dans son baromètre 2019 du numérique que l’ordinateur est un équipement qui reste un investissement non négligeable. « Si 92 % des membres des foyers avec des hauts revenus sont équipés, seulement 64 % de ceux qui vivent dans les foyers avec des bas revenus le sont »,
Des communes proposent des solutions suite au manque d'équipement. Par exemple, des tablettes sont attribuées aux parents qui n'ont pas d'équipement. Dans le cadre de la continuité pédagogique, des villes ont distribué des tablettes, aux familles de la commune en difficulté face au numérique. Il s'agit de réduire la fracture numérique si cela est possible et, comme le suggérait la cour des comptes en 2019, « il faut mettre en place des dispositifs d’aides ciblées, en faveur des élèves qui en font la demande, et qui satisfont à des critères sociaux ».
2. Des impacts positifs pour les élèves :
Bien que l'apprentissage à distance ait posé de nombreux défis et quand l'équipement informatique est assuré, certains élèves semblent « prospérer » dans le cadre de ce nouveau contexte. Afin de mieux comprendre ce que vivent actuellement les élèves, qu’ils fréquentent l’école élémentaire, le collège ou le lycée, des chercheurs du Laboratoire BONHEURS (EA 7517) ont mis en ligne un questionnaire comprenant 42 questions. Il porte sur la façon dont se déroule l’enseignement à distance et dont la situation actuelle affecte le quotidien des élèves. [1]
Les premiers résultats s’intéressent en particulier à la manière dont les élèves parviennent à s’adapter à ce contexte sans précédent et à y trouver, malgré tout, des éléments positifs.
Extraits :
« Le gain d’autonomie est l’élément le plus fréquemment invoqué : le mot autonomie apparaît dans 100 réponses sur 365. Voici quelques exemples de ce qu’en disent les élèves : « Je pense que je serai plus autonome. » (élève de 6e) ; « Apprendre à bien s’organiser et à être autonome » (élève de 1re). Certains élèves anticipent également la suite de leur parcours scolaire ou l’entrée dans le supérieur : « J’apprends que je suis autonome et peut-être prêt pour la 6e. » (élève de CM2) ; « Nous avons appris à faire nos cours et devoirs de manière autonome, ce qui peut être un avantage pour nos futures écoles et universités. » (élève de Terminale). »
Les réactions d'enseignants sur le réseau social Twitter, nous apportent également des éléments intéressants. Des élèves décrocheurs semblent s'accrocher au numérique et réagissent d'une façon positive dans le contexte de l'école à la maison.
Lien : 30 mars 2020 : https://twitter.com/
Lien : 30 mars 2010 : https://twitter.com/
Lien : 24 avril 2020 : https://twitter.com/
De même, dans son étude, Nora Fleming nous partage ses observations[2] . Quelques extraits :
« Je pense que le fait de ne pas avoir ces distractions quotidiennes à l'école a vraiment permis à des enfants perturbateurs de se concentrer sur leur travail. Les enfants timides, hyperactifs, très créatifs réussissent soudainement mieux avec l'apprentissage à distance qu'en classe en présentiel. ».«C’était génial de voir certains de mes élèves enfin trouver leur place dans l’éducation», a déclaré Holli Ross, une enseignante de première année du secondaire dans le nord de la Californie, faisant écho aux sentiments de dizaines d’enseignants interrogés ».
Pendant la pandémie, les horaires scolaires sont soudainement devenus plus flexibles, permettant aux élèves de choisir leur temps et leur méthode de travail :
«Je pense que quelques-uns des miens se débrouillent très bien pour avoir un avant-goût de plus d'indépendance», a déclaré Lauren Huddleston, professeur d'anglais au collège à Memphis, Tennessee. "Ils ne sont plus sous la « microgestion » de la journée scolaire." LAshlee Tripp, enseignante d'anglais au secondaire, a émis l'hypothèse que ces élèves se portaient bien parce qu'ils «apprécient la liberté de travailler à leur propre rythme ».
« La raison pour laquelle j'apprécie l'apprentissage en ligne est la possibilité de structurer ma journée efficacement », a écrit une étudiante de 10e année au professeur d'anglais. « Je suis capable de m'entraîner, de me détendre et de terminer le travail en temps opportun, sans distraction. »
« Je pense qu'une grande partie de l'amélioration du travail de certains élèves est que nous avons considérablement réduit la charge de travail totale afin de rendre les tâches accessibles plutôt qu'écrasantes », a déclaré Mark Gardner, professeur d'anglais au lycée à Camas, Washington.
Une étude étude plus complète avec un échantillon d'élèves plus important serait nécessaire pour analyser comment les élèves se sont emparés du travail scolaire à distance, de dégager tous les bénéfices et aussi les échecs.
3. Une continuité pédagogique pour apprendre son « métier d'élève ».
Le travail scolaire n’est pas un travail comme les autres. Tout d’abord, il n’a pas d’utilité immédiate visible. Ensuite, la plupart des tâches ne sont pas décidées par les élèves, mais imposées par l’enseignant dans le cadre des programmes scolaires. Une des clés de la réussite des élèves est de leur donner des outils et des méthodes pour construire leurs connaissances et compétences, pour « apprendre à apprendre ». Ces outils pour apprendre sont ceux qui sont listés dans le domaine n°2 du socle commun avec la nécessité du recours à l’activité réflexive de la part des élèves. Pour l'enseignement à distance, l'organisation du travail personnel prend tout son sens en dehors de la présence de l'enseignant et s'inscrit dans le Décret n° 2015-372 du 31 mars 2015 relatif au socle commun de connaissances, de compétences et de culture
Extraits :
« L'élève se projette dans le temps, anticipe, planifie ses tâches. Il gère les étapes d'une production, écrite ou non, mémorise ce qui doit l'être. Il comprend le sens des consignes ; il sait qu'un même mot peut avoir des sens différents selon les disciplines. Pour acquérir des connaissances et des compétences, il met en œuvre les capacités essentielles que sont l'attention, la mémorisation, la mobilisation de ressources, la concentration, l'aptitude à l'échange et au questionnement, le respect des consignes, la gestion de l'effort. Il sait identifier un problème, s'engager dans une démarche de résolution, mobiliser les connaissances nécessaires, analyser et exploiter les erreurs, mettre à l'essai plusieurs solutions, accorder une importance particulière aux corrections. L'élève sait se constituer des outils personnels grâce à des écrits de travail, y compris numériques : notamment prise de notes, brouillons, fiches, lexiques, nomenclatures, cartes mentales, plans, croquis, dont il peut se servir pour s'entraîner, réviser, mémoriser. »
Le numérique peut nous aider avec toutes ses potentialités. A ce propos, et comme le précise Jean-Marc Monteil dans la dépêche AEF du 10 Juillet 2015, avec le numérique, l’enjeu est de penser des « contextes variés d’apprentissage ».« L’idée du socle commun de culture générale de tous les élèves, les enseignants, les citoyens est d’autant plus important qu’il est indispensable de s’approprier la place du numérique dans le couple enseigner/apprendre ».
Entre la zone d'ennui et la zone de panique, les enseignants doivent trouver le bon équilibre pour des apprentissages en autonomie ![3] et définir des situations d'apprentissage adaptées (Cf Article https://medvasc.info/)
Les travaux de Brad Nguyen nous invitent à adapter l'enseignement à l'apprentissage à distance en y intégrant aussi une dimension sociale : « C'est à plusieurs, que j'apprends tout seul ».
Si la didactique va de paire avec une discipline donnée, avec l'enseignement à distance, il nous reste à inventer une nouvelle discipline transversale « apprendre à apprendre ».[4] Il est important de donner un sens aux apprentissages des élèves, qu'ils puissent disposer d'une boussole, une feuille de route ou d'un plan de travail et d'une boîte à outils.
La métacognition est essentielle pour apprendre, comme nous le rappelle Meirieu[5] et nous permet de mieux analyser comment on apprend. (La métacognition est la « cognition sur la cognition » (le préfixe μετά signifiant « sur, à propos » en grec ancien). Autrement dit, la métacognition consiste à avoir une activité mentale sur ses propres processus mentaux, c'est-à-dire « penser sur ses propres pensées ». (Wikipédia). Le numérique peut nous y aider, en exploitant les traces des élèves. Ces derniers peuvent visualiser et valider leurs réussites d'une façon positive.
Lien : https://twitter.com/
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Tout l'enjeu de l'enseignement à distance est de pouvoir aider les élèves à retrouver le chemin des apprentissages scolaires afin qu’il apprennent les savoirs de l'école et qu'ils puissent réussir. Pour avancer ensemble sur ce chemin virtuel à distance, il semble fondamental que les activités pour l'élève soient déterminées par des objectifs qui permettent à l’élève de construire des outils mentaux pour apprendre. L’apprenti a besoin de ses outils pour avancer, l’élève aussi !
Source photo (cerveau ) : https://www.performanse.com/5-conseils-pour-susciter-et-cultiver-lenvie-dapprendre-dans-lentreprise/
Bibliographie – Liens
ENT - Espace Numérique de Travail
https://www.education.gouv.fr/
Rapport cour des comptes - Novembre 2019
Le service public numérique pour l'éducation .
https://www.ccomptes.fr/fr/
Etude Laboratoire de la société du numérique
https://labo.societenumerique.
Etude CREDOC 2019
https://www.credoc.fr/
Apprendre à apprendre -Quelle place pour le numérique ?
Michèle Drechsler dans la Revue THOT 2016
https://cursus.edu/articles/
Article Edutopia Nora Fleming 24 Avril 2020
Why Are Some Kids Thriving During Remote Learning?
https://www.edutopia.org/
[1]//medium.com/@pascale.haag/
(2] Article Edutopia Nora Fleming 24 Avril 2020
Why Are Some Kids Thriving During Remote Learning?
https://www.edutopia.org/
[3] Document HEC Zone proximale de développement
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#1MASQUEPOURTOUS, c'est maintenant
