"Un médecin n'est pas un bon médecin s'il n'a été lui-même malade." Proverbe Arabe
Patients Partenaires Patient partenaires
REACH Gérard, JAURY Philippe Pour le Groupe de Travail Patients Partenaires
https://www.academie-medecine.fr/wp-content/uploads/2024/05/Rapport-Patient-Partenaire-APRES-VOTE-PLENIERE-1.pdf
Rapport libre d'accès
EXTRAITS
Résumé
Le concept de patient partenaire est une étape importante sur le long chemin de l’évolution sociétale en médecine. Il repose sur la reconnaissance de l’existence d’un savoir fondé sur l’expérience de leur maladie développée par les patients ayant une pathologie chronique. Les patients partenaires peuvent faire profiter de ce savoir les autres patients (rôle de pair-aidant), les étudiants en santé (rôle de patient-enseignant), les chercheurs (rôle de cochercheur) et les instances décisionnelles (rôle des Associations de patients). Dans ce rapport, nous privilégions le terme de patient partenaire, par rapport à celui de patient expert. Le concept de patient partenaire doit être vu comme un moyen d’améliorer l’efficacité des soins en général et la relation thérapeutique en particulier. Une co-construction précise de sa mise en oeuvre est
indispensable. Des garde-fous doivent être mis en place pour éviter des démarches illégitimes pouvant aboutir à des non-sens médicaux ou des dérives mercantiles, voire sectaires. Pour éviter ces dérives, les patients partenaires doivent pouvoir avoir bénéficié d’une formation, actuellement délivrée dans plusieurs universités et/ou par des Associations de patients ellesmêmes. Le développement à côté de la médecine de précision (pour les patients) d’une médecine participative (avec les patients) contribue au développement d’une médecine apportant en même temps les meilleurs traitements médicaux et les meilleurs soins humains.
..................Terminologie : patient expert ou patient partenaire ?
Le terme « patient expert » fait référence à une personne atteinte d'une maladie chronique qui a acquis une expertise dans la gestion de sa maladie au fil du temps. Ce concept est désigné par diverses expressions, telles que patient partenaire, patient engagé, patient concerné... L'utilisation de plusieurs termes pour désigner un concept nécessite une réflexion pour en clarifier le sens : en effet, le choix d'un terme doit favoriser la communication avec les parties prenantes et le grand public.
Le rapport préconise l'utilisation du terme « patient partenaire » pour unifier la dénomination. Cette décision découle de plusieurs arguments, notamment la difficulté de définir l'expertise, le risque d'opposer l'expertise du patient à celle des professionnels de santé et la restriction du terme « patient expert » par rapport à la diversité des rôles des patients dans le système de santé. Enfin le terme « patient partenaire » est parfaitement en ligne avec le concept de médecine participative qui reflète l’évolution moderne de la médecine, en harmonie avec les transformations de la société.
............Le savoir des patients
Le concept même de patient partenaire implique fondamentalement la prise en compte du fait que les patients atteints de maladie chronique acquièrent un savoir, souvent qualifié de « savoir profane », pour le distinguer du savoir des professionnels de santé. Ce savoir est multiforme, pouvant être décrit en termes de savoirs expérientiels, implicites et explicites, de savoirs « situés ou positionnés » dans le cadre d’un savoir collectif ; il a des aspects à la fois théoriques, pratiques et techniques. Chacun de ces types de savoirs donne au patient un pouvoir sous forme de capacités qui lui permettent d’agir sur lui-même, de s’adapter, d’interagir avec les autres, de générer des ressources, des idées et des connaissances nouvelles . Ainsi, c’est grâce à ces savoirs que la personne ayant une maladie chronique peut, de patient, être passif à qui les événements arrivent, devenir agent, être actif par qui les événements arrivent. Il devient acteur
et même auteur, à la fois dans son traitement et dans l’organisation du système de soins.
..............Formation des patients partenaires
Lors du développement de l’Éducation Thérapeutique du Patient (ETP) dans la prise en charge des maladies chroniques, l’importance de la formation des soignants a été affirmée. Lapossibilité de faire participer des patients à des interactions avec d’autres patients a donc conduit naturellement à la question de leur formation. Celle-ci peut être réalisée à la fois par des instances de type universitaire et par des associations de patients agréées elles-mêmes. Ainsi, pour une implication en éducation thérapeutique, la formation de ces nouveaux acteurs est réglementairement obligatoire, comme pour tous les intervenants dans les programmes d’ETP, par le biais d'une formation de base de niveau 1 (40 heures, arrêtés de 2013 et 2020) (16).
Il convient de souligner ici l'importance de la formation des professionnels de santé eux-mêmes à cette « médecine participative » et au partenariat patient-professionnel de santé qui en découle. En effet, il s’agit d’un nouveau paradigme qui implique à la fois les patients, les professionnels de santé et les étudiants en santé.
....................L’analyse des données d’une étude systématique de la littérature (non encore publiée) permet de souligner les 8 points suivants :
1. Les acteurs impliqués, les universités, les enseignants et les patients partenaires eux-mêmes soutiennent l'engagement des patients partenaires.
2. Les méthodes de recrutement des patients partenaires varient, allant d’informations dans les établissements de santé à des annonces dans la presse et sur les médias sociaux. Certains programmes utilisent également des professionnels de la santé pour ce recrutement.
4. Les pratiques de dédommagement et/ou de rémunération des patients partenaires varient d'un programme à l'autre.
5. Les patients partenaires sont le plus souvent impliqués dans de simples témoignages, mais certaines études montrent qu'ils participent de plus en plus au développement des programmes d'études.
6. Les patients partenaires jouent un rôle dans la priorisation des enseignements, la définition des objectifs des programmes, et contribuent à divers aspects pédagogiques.
7. Les études montrent que les étudiants en médecine sont généralement satisfaits de
l'intervention des patients partenaires dans leur formation. Ils estiment que cela améliore leurs compétences relationnelles et les prépare mieux à la pratique médicale.
8. Il existe des divergences d'opinions quant à savoir si l'intervention des patients dans la
formation des étudiants en santé devrait être mise en place dès que possible ou s'il faudrait attendre que les étudiants aient une certaine expérience sur le terrain.
RECOMMANDATIONS
Prenant en compte l’importance de reconnaître au patient, atteint d’une pathologie chronique, un savoir fondé sur l’expérience de leur maladie, l’Académie nationale de médecine formule les recommandations suivantes :
1 Promouvoir l'implication des patients partenaires dans les soins, la formation des
étudiants en santé et la recherche, ainsi que le rôle des associations agréées de
patients.
2. Vérifier la légitimité des patients partenaires, assurée par une charte garantissant une
formation initiale et continue adaptée à leurs différentes fonctions possibles, un esprit
de responsabilité et le respect du devoir de confidentialité.
3. Intégrer le concept de patient partenaire dans les études médicales avec le soutien
des enseignants et des doyens.
4. Adopter le terme « patient partenaire » pour exprimer l'engagement des patients dans
la médecine participative.
..........................Une première application du savoir des patients partenaires est de leur permettre d’aider des patients atteints de la même pathologie, ce qui est bien décrit sous le terme de « pair-aidant »,
Pr Gérard Reach
Les patients partenaires doivent-ils être formés ?
P. J. : Oui, ils doivent recevoir une formation avec un cahier des charges en adéquation avec la fonction qu’ils souhaitent remplir, pour dépasser le simple témoignage. Ces formations peuvent être dispensées à l’université – Catherine Tourette-Turgis a ainsi fondé en 2010 l’Université des patients à la Sorbonne et le modèle s’est dupliqué – ou dans des associations comme la Fédération française des diabétiques, l’association France patients experts addictions ou encore l’Alliance maladies rares… Il n’y a pas de modèle unique de formation, il faut de la souplesse.
Nous insistons aussi sur l’importance d’une charte que les patients partenaires pourraient signer, s’engageant ainsi à respecter trois principes : la formation initiale et continue, la responsabilité, la confidentialité. La reconnaissance de leur statut dans le parcours de soins s’accompagne de droits et de devoirs. Le patient partenaire est tenu au strict respect du secret médical, quand bien même il n’a pas accès aux dossiers médicaux.
https://cardiologie.lequotidiendumedecin.fr/jeunes-medecins/formation-initiale/prs-gerard-reach-et-philippe-jaury-le-patient-partenaire-est-une-evolution-societale-majeure
Commentaire
Diabètique insulino requérent depuis 15 ans j'ai réappris le diabète ce qui me transforme en patient partenaire des patients. Je suis à la fois malade et soignant mais en même temps à l'écoute des diabétiques , avec des conseils partagés avec les patients. Et c'est vrai qu'être malade permet de mieux soigner et de mieux comprendre le patient. Sachant que je suis diabétique , la consultation devient un partage d'expérience passionnant ...... et surtout très efficace....nous en reparlerons mais c'est un théme majeur aujourd'hui dans ma pratique.
Un exemple de patient partenaire ! Eleonore Piot, patiente partenaire (expert LYMPHOEDEME)