Asymptomatique

  • carotide asymptomatique : post chirurgie

    « Je trouve toujours intéressants les rapports qui concluent que quelque chose n'est pas arrivé ; parce que, comme chacun sait, il y a le connu connu, c’est à dire les choses que nous savons que nous savons ; nous savons aussi qu'il y a l'inconnu connu, c’est à dire les choses que nous savons que nous ne savons pas ; mais il y a aussi l'inconnu inconnu — les choses que nous ne savons pas que nous ne savons pas. Or si l'on examine l'histoire de notre pays, et d'autres pays libres, c'est dans cette dernière catégorie que se trouvent les cas difficiles. »Donald Rumsfeld , belle citation qui résume parfaitement la question de la sténose carotidienne asymptomatique

    "Une sténose carotide asymptomatique est donc définie comme sans aucun antécédent neurologique déficitaire focalisé, hémisphérique ou oculaire, dans le territoire homolatéral à la sténose dans les 4 à 6 mois précédents."François Becker

    Reamarque préliminaire : 

    Sténose carotidienne asymptomatique
    Jean Louis MAS in Traité de Médecine Vasculaire 2021, Elsevier Masson


    "La prévalence des sténoses carotidiennes augmente avec l'âge. Elle varie de 0,2 % chez les sujets âgés de moins de 50 ans à 7,5 % pour les sténoses modérées (50–69 %) et 3,1 % pour les sténoses serrées (70–99 %) chez les plus de 80 ans avec, à âge égal, une prédominance masculine . La prévalence des sténoses carotidiennes est plus importante chez les patients ayant des facteurs de risque vasculaire (hypertension artérielle, tabac, diabète et hypercholestérolémie)  Enfin, ces sténoses sont plus fréquentes chez les patients ayant une autre localisation de l'athérosclérose. Leur prévalence est de 12 % à 38 % en cas d'artériopathie des membres inférieurs [8] et de 4 à 13 % en cas de coronaropathie  pour les sténoses d'au moins 50 %. Les sténoses carotidiennes extracrâniennes sont responsables d'environ un infarctus cérébral sur dix.

    Le caractère asymptomatique d'une sténose carotidienne est habituellement défini par l'absence d'infarctus cérébral ou d'accident ischémique transitoire (AIT) en rapport avec cette sténose au cours des 6 mois précédents. Cette définition se justifie par le fait qu'après un infarctus cérébral ou un AIT, le risque de récidive d'infarctus cérébral décroît pour atteindre en quelques semaines un risque proche de celui d'une sténose n'ayant jamais provoqué d'accident ischémique cérébral. La définition est aussi purement clinique. La découverte fortuite d'un infarctus cérébral silencieux en aval d'une sténose sur un scanner ou une IRM cérébrale ne doit pas faire considérer la sténose comme symptomatique et enclencher une prise en charge urgente, même si la découverte de cette lésion silencieuse apporte des informations d'ordre pronostique"
    STECARO11
    Incidence of Ischemic Stroke in Asymptomatic Severe Carotid Stenosis,Chang RW, Tucker LY, Rothenberg KA, et al., Incidence of Ischemic Stroke in Patients WithAsymptomatic Severe Carotid Stenosis WithoutSurgical Intervention. JAMA2022;327:1974-1982
    Incidence de l'AVC ischémique dans la sténose carotidienne sévère asymptomatique

    https://www.acc.org/Latest-in-Cardiology/Journal-Scans/2022/05/26/14/11/Incidence-of-Ischemic-Stroke

    Points importants

    • Il existe une incertitude quant à la supériorité de la prise en charge médicale ou de l'intervention chirurgicale (endartériectomie carotidienne ou stenting carotidien) en cas de sténose carotidienne asymptomatique sévère (70-99%).
    • Cette incertitude est due en partie à l'amélioration de la thérapie médicale moderne, qui peut être associée à un taux plus faible d'accidents vasculaires cérébraux ischémiques liés à une maladie carotidienne par rapport aux données d'études plus anciennes.
    • Les chercheurs de cette étude rétrospective ont cherché à définir le risque d'accident vasculaire cérébral ischémique parmi une cohorte plus contemporaine de patients atteints de sténose carotidienne asymptomatique sévère identifiée entre 2008 et 2012.
    • Parmi 3 737 patients avec ≥ 1 carotide asymptomatique sévèrement sténosée, le risque annuel d'AVC ischémique ipsilatéral était faible, à environ 1 %.

    Question :

    Quel est le risque à long terme d'AVC ischémique ipsilatéral chez les patients présentant une sténose carotidienne asymptomatique sévère ?

    Méthodes :

    Les patients inclus dans cette analyse rétrospective présentaient une sténose de 70 à 99 % de ≥ 1 artère carotide identifiée entre 2008 et 2012 et n'avaient aucun antécédent d'accident ischémique transitoire (AIT)/AVC au cours des 6 mois précédents. Si un patient avait une sténose sévère asymptomatique bilatérale, chaque artère était évaluée indépendamment. Le critère de jugement principal était l'AVC ischémique aigu ipsilatéral à la carotide sévèrement sténosée.

    Résultats:

    Un total de 4 230 artères présentant une sténose sévère asymptomatique chez 3 737 patients ont été incluses dans l'analyse finale : 133 (3,1 %) AVC ischémiques liés à la carotide sont survenus chez 129 (3,5 %) patients sur 4,1 années moyennes de suivi. Le taux annuel d'AVC ipsilatéral était de 0,9 % (intervalle de confiance à 95 %, 0,7-1,2 %).

    Conclusion :

    Dans cette étude rétrospective de patients présentant une sténose carotidienne asymptomatique sévèrement sténosée sans intervention chirurgicale, le risque annuel d'AVC ipsilatéral était d'environ 1 %.

    Perspective:

    Il n'est pas certain que la prise en charge médicale ou l'intervention chirurgicale (endartériectomie carotidienne ou stenting carotidien) soit supérieure chez les patients présentant une sténose carotidienne asymptomatique sévère. 

    stecaro1

    Dans cette étude rétrospective, le risque annuel d'AVC lié à la carotide chez ces patients n'était que d'environ 1 %.
     

    Compte tenu de ce faible risque annuel, le taux de complications d'une intervention chirurgicale pour une maladie asymptomatique devrait être extrêmement faible pour fournir un profil risque-bénéfice favorable. 

    L'essai multicentrique CREST-2 en cours de recrutement (NCT02089217), dans lequel les patients atteints de sténose carotidienne sévère asymptomatique sont randomisés pour recevoir un traitement médical plutôt qu'une intervention, aidera à clarifier la meilleure approche pour ces patients.

    CREST 2 : Revascularisation carotidienne et prise en charge médicale de l'essai sur la sténose carotidienne asymptomatique (CREST-2);  Identifiant ClinicalTrials.gov : NCT02089217

    Résumé :

    La revascularisation carotidienne pour la prévention primaire des accidents vasculaires cérébraux (CREST-2) est constituée de deux essais contrôlés randomisés multicentriques indépendants sur la revascularisation carotidienne et la prise en charge médicale intensive par rapport à la prise en charge médicale seule chez des patients présentant une sténose carotidienne asymptomatique de haut grade. Un essai randomisera les patients selon un ratio 1:1 entre l'endartériectomie et l'absence d'endartériectomie et un autre randomisera les patients selon un ratio 1:1 entre l'endoprothèse carotidienne avec protection embolique versus l'absence d'endoprothèse. La prise en charge médicale sera uniforme pour tous les groupes de traitement randomisés et sera centralisée.

    Commentaire

    De nouvelles preuves liées aux préjudices liés aux procédures provenant des bases de données nationales et des registres chirurgicaux contemporains ont signalé des taux de complications ; cependant, leurs biais de sélection et de mesure restent de sérieuses préoccupations. La grande variation signalée dans les taux de complications peut être attribuable à la sélection du patient et du chirurgien/opérateur. Bien qu'il y ait eu peu de nouveaux essais examinant l'efficacité comparative de la revascularisation par rapport au meilleur traitement médical contemporain seul, le CREST-2 en cours ( NCT02089217 , date d'achèvement estimée de décembre 2022), ECST-2 ( ISRCTN97744893 , date d'achèvement estimée de mars 2022), et les essais ACTRIS ( NCT02841098 , date d'achèvement estimée en décembre 2025) viendront s'ajouter à cette base de données probantes sur le traitement de la sténose asymptomatique de l'artère carotide à l'avenir.

    Donc wait and see. La découverte d'une  sténose carotidienne asymptomatique de 60 à  70% nécessite la prise en compte de plusieurs paramètres : 

    Sténose carotide asymptomatique : quels patients pourraient bénéficier de la chirurgie ? 

    < 75 ans, espérance de vie > 5 ans
     Homme > Femme
    Sténose  ≥ 70% NASCET
     Infarctus cérébral ipsilatéral silencieux (type embolique)
     Diminution de la réserve circulatoire cérébrale
     Progression de la sténose avec traitement médiacl optimal suivi

    STECARO5STECARO4
    Les souhaits du patient et de son entourage
     Signaux micro-emboliques au DTC
     Structure de la plaque : IRM, ultrasons, PET, …
     Biomarqueurs circulants


    En rouge nécessité d'une validation

    RCP NEURO VASCULAIRE avant prise de décision pour les sténoses carotidienne asymptomatique

    En pratique , découverte d'une sténose carotidienne asymptomatique >/= 70% (NASCET) 

    - s'assurer que sue le plan clinique que cette sténose est vraiment asymptomatique, attention à l'AIT passé inaperçu (interrogatoire, toujours et encore)
    - S'assurer que la correction des FDRCV est effective
    - S'assurer ou prescrire un traitement médical OPTIMAL : Statine, AAP, IEC
    - Expliquer au patient les raions de votre décision

    - Faut il prescrire un angio scanner : pas systématiquement, au cas par cas, sténose dont la quantification en écho Doppler pose problème
    - Faut-il prescrire une IRM cérébrale afin de "rendre la sténose asymptomatique en sténose symptomatique " ?
    - Suivi écho Doppler tous les 6 mois, une évolutivité de la sténose peut être un argument pour intervenir ainsi que des modifications de la structure de la plaque 
    - Une occlusion carotidienne contro latérale nécessite un avis en RCP Neuro Vasculaire
    - DEMAIN l'IA devrait nous apporter des réponses quant à la vulnérabilité de la plaques.

    La sténose carotidienne ASYMPTOMATIQUE  alimente la controverse depuis de nombreuses années....jusqu'à quand ?

    La sagesse et la prudence  : 
    "La valeur ajoutée de la revascularisation des sténoses carotides asymptomatiques par rapport au traitement médical moderne est incertaine. Elle est en cours de réévaluation dans des essais randomisés. En attendant les résultats de ces études, la décision d’une revascularisation carotide ne semble devoir être envisagée que chez des patients ayant des caractéristiques cliniques et en imagerie associées à un risque plus élevé que la moyenne d’infarctus cérébral ipsilatéral, ayant une espérance de vie permettant d’envisager un réel bénéfice du traitement et ayant été informés des risques d’infarctus cérébral ipsilatéral sous traitement médical seul, ainsi que des risques et des incertitudes sur les bénéfices de la revascularisation par chirurgie ou stenting carotide."https://www.realites-cardiologiques.com/2017/02/15/stenoses-carotides-asymptomatiques/

    Le mot de la fin à François Becker  
    "L’écho-Doppler cervical et transcrânien a un rôle majeur à jouer mais à condition qu’on arrête de dire «ah mais, c’est opérateur-dépendant ! », à condition que le but de cet examen aille bien au-delà de sténose < ou > 50%, à condition qu’on sache utiliser toutes les possibilités de l’EDC et de l’EDTC pour dire risque standard ou haut-risque neurovasculaire ipsilatéral.
    Dans le cas contraire je crois que l’EDC n’aura bientôt, n’a peut-être déjà, plus d’intérêt dans les sténoses carotides asymptomatiques.

    Enfin si demain on se met véritablement à vouloir faire des économies de santé, peut-être qu’on misera tout sur le TMO (traitement médical optimal) chez les patients avec des facteurs de risque vasculaires, avec un traitement gradué en fonction du risque, sans chercher à savoir si les patients ont telles ou telle lésions ou sténoses......"

    https://medvasc.info/1425-entretien-fran%C3%A7ois-becker-21-10-21-st%C3%A9nose-carotidienne-asymptomatique




  • Sténose carotide asymptomatique : show must go on !

    “Une décision n'est bonne que lorsqu'elle est prise.”
    Anonymus

    "Une évaluation du risque est essentiellement une estimation de la probabilité, mais prédire le comportement humain n'est pas fiable et incertain." Liz Tate et Adrian Feeney

    Emerging evidence suggests that patients with high-grade asymptomatic carotid stenosis should be revascularized
     
    De nouvelles preuves suggèrent que les patients présentant une sténose carotidienne asymptomatique de haut grade devraient être revascularisés
    Christos D.Liapis, Hans-Henning Eckstein, Kosmas I.Paraskevas,Jack L.Cronenwett, JVS, Volume 75, Issue 1, Supplement, January 2022
    https://www.jvascsurg.org/article/S0741-5214(21)00898-3/fulltext
    Libre d'accès

    La prise en charge de la sténose carotidienne asymptomatique (SCA) reste un sujet de débat approfondi
    .
     
    Selon les recommandatioins de 2009 de la Société européenne de chirurgie vasculaire (ESVS) pour la prise en charge des patients atteints de sténose carotidienne, l’endartériectomie carotidienne (ACE) peut être recommandée pour les hommes asymptomatiques de moins de 75 ans présentant une sténose de 70% à 99% si le risque associé à la chirurgie est inférieur à 3% (grade A).
     
    Les recommandations de 2011 de la Society for Vascular Surgery (SVS) recommandaient également que les patients atteints d’un SCA à ≥ 60 % soient pris en compte pour l’ACE afin de réduire le risque d’AVC à long terme, à condition qu’ils aient une espérance de vie de 3 à 5 ans et que les taux d’AVC / décès périopératoires soient de ≤3 % (grade I; niveau de preuve : A).
     
    En raison des améliorations apportées au traitement médical optimal (OMT) depuis la publication des essais contrôlés randomisés (ECR) marquants, il a été suggéré que l’ACE n’apporte pas d’avantage significatif aux patients atteints de SCA par rapport à l’OMT seul.
     
    En conséquence, en 2017, la Société européenne de chirurgie vasculaire a rétrogradé ses lignes directrices précédentes pour la prise en charge des patients atteints de SCA afin de recommander que pour les patients présentant un SCA de 60 % à 99 %, l’ACE ne soit envisagée qu’en présence d’une ou de plusieurs caractéristiques d’imagerie pouvant être associées à un risque accru d’AVC ipsilatéral, les taux projetés d’AVC/décès périopératoires <3 % et l’espérance de vie >5 ans (classe IIa; niveau de preuve : B).
    1221 angioscanner stenose carotidienne plaquehttps://www.carotide.com/plaque-d-atherome-et-stenose-carotidienne/
     
    La base de ce déclassement était deux ECR qui ont démontré que l’augmentation de la gravité de la sténose (y compris les sténoses bilatérales et l’occlusion controlatérale) n’était pas associée à une augmentation des taux d’AVC tardif chez les patients randomisés dans l’OMT.

    De plus, une méta-analyse de 2014 portant sur 41 études (6 ECR ; 35 études observationnelles) a démontré que le risque d’AVC ipsilatéral était similaire chez les patients présentant un SCA de 50 % à 70 % vs 70 % à 99 % (1,9/100 vs 2,1/100 années-personnes, respectivement ; P= 0,427).
     
    Comme les auteurs l’ont suggéré, l’absence de différence peut être due à l’hétérogénéité dans la définition et la mesure du degré de sténose entre les études. Lorsque les analyses ont été stratifiées en fonction de la gravité de la sténose (au lieu d’utiliser la méta-régression), la différence est devenue plus prononcée (2,4 vs 1,6 pour 100 années-personnes). Contrairement à la méta-analyse de 2014,
    Une étude de cohorte récente basée sur la population, une revue systématique et une méta-analyse ont rapporté des résultats opposés.
     
    L’Oxford Vascular Study a recruté des patients du 1er avril 2002 au 1er avril 2017, qui ont été référés pour l’imagerie carotidienne et se sont révélés avoir un SCA de toute gravité (n = 2178).
     
    Parmi ceux-ci, 154 personnes avaient un SCA de 50 % à 69 % et 53 avaient un SCA de 70 % à 99 %. Tous les patients ont commencé à prendre un OMT contemporain, y compris un antiplaquettaire / anticoagulant, une statine et au moins un agent hypotenseur. Après un suivi médian de 5,9 ans, il y a eu 16 événements ischémiques (8 AVC et 8 AIT) ipsilatéraux du côté du SCA à 50 % à 99 %. Le risque d’AVC ischémique ipsilatéral à 5 ans était significativement plus élevé chez les patients présentant une sténose de 70 % à 99 % que chez les patients présentant une sténose de 50 % à 69 % (14,6 % [intervalle de confiance (IC) à 95 % : 3,5-25,7] vs 0 %, respectivement ; P< 0,0001) et également plus élevé chez les patients avec 80% à 99% que chez ceux avec 50% à 79% de sténose (18,3% [IC à 95%: 7,7-29,9] vs 1,0% [IC à 95%: 0,0-2,9], respectivement; P< .0001).
     
    Une méta-analyse incluant 23 études (n = 8419 patients) rapportant un risque d’AVC ipsilatéral chez des patients atteints de sténose modérée et sévère a révélé une association linéaire du risque d’AVC avec le degré de sténose (P< 0,0001), avec un risque > fois plus élevé pour les patients avec 70% à 99% vs 50% à 69% ACS (rapport des cotes: 2,1; IC à 95%: 1.7-2.5; P< 0,0001) et un risque 2,5 fois plus élevé chez les patients présentant un SCA de 80 % à 99 % vs 50 % à 79 % (rapport des cotes : 2,5 ; IC à 95 % : 1,8-3,5 ; P< .0001).
     
    Les auteurs ont conclu qu’il pourrait être inapproprié d’omettre le degré de sténose comme facteur de sélection pour l’intervention chez les patients atteints de SCA et de préconiser plutôt l’utilisation d’autres marqueurs de substitution pour la sélection des patients (p. ex., analyse informatisée de la plaque, écholcidose de plaque et hémorragie intraplaque sur l’imagerie par résonance magnétique).
     
    Il a en outre été conclu que, bien que les taux signalés d’AVC ipsilatéral aient diminué au fil du temps, le risque d’AVC est toujours élevé pour les patients atteints de sténose de haut grade sur OΜΤ contemporain, « suggérant que les avantages de l’intervention chirurgicale pourraient être sous-estimés ».
     
    Une conclusion similaire a été tirée dans une étude de cohorte basée sur la population invitant tous les hommes de 65 ans vivant dans le comté d’Uppsala, en Suède (n = 3057), à un examen échographique carotidien.
     
    Les individus ont été regroupés en fonction de la présence d’athérosclérose carotidienne (carotides normales, plaque sans sténose significative, modérée [50%-79%] et sévère [80%-99%] SCA). Les mêmes personnes ont fait l’objet d’un nouveau dépistage à l’âge de 70 ans. Parmi les personnes atteintes de plaque mais pas de sténose significative (n = 696), 25 (3,6%) ont évolué vers une sténose modérée et 8 (1,1%) vers une sténose sévère, dont 4 (0,6%) ont développé des symptômes neurologiques. Sur 31 hommes atteints d’un SCA de 50 % à 79 %, 4 (12,9 %) ont évolué vers une sténose sévère, dont 2 (6,5 %) ont développé des symptômes. Enfin, 5 des 12 personnes (42%) avec 80% à 99% SCA ont développé des symptômes. Cette étude indépendante a démontré un risque élevé d’événements neurologiques chez les patients atteints de SCA sévère.
     
    Alors, quelles sont les questions qui guident la sélection de patients spécifiques du SCA pour l’intervention envisagée? La sténose sévère semble être importante. Comme le montrent les deux rapports indépendants récents, sténose sévère (80 % à 99 %) mais pas modéré (50 % à 79 %)Le SCA est une condition préalable à la recommandation de l’ACE. Les patients présentant des degrés modérés de SCA n’ont pas un risque d’AVC suffisamment élevé pour justifier une intervention carotidienne prophylactique.
     
    Cette question clé a été reconnue dans les lignes directrices mises à jour de 2021 sur la prise en charge des maladies cérébrovasculaires extracrâniennes.

    Après évaluation des preuves disponibles, une forte recommandation a été formulée en faveur de l’ACE plus OMT plutôt que de l’OMT seul pour la prévention à long terme des accidents vasculaires cérébraux et des décès chez les patients à faible risque chirurgical présentant un SCA à >70 % (grade I ; niveau de preuve : B).
     
    Une autre question cruciale est la normalisation des critères d’échographie duplex carotidienne pour guider la classification duplex de la gravité de la maladie. La variation substantielle des protocoles institutionnels pour déterminer le degré de SCA et, par conséquent, le seuil d’intervention entraîne un pourcentage élevé de sous-estimation ou de surestimation du SCA et a un effet profond non seulement sur les résultats pour les patients, mais aussi sur les coûts des soins de santé.

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    Offrir une intervention carotidienne prophylactique à des patients asymptomatiques sélectionnés atteints d’un SCA à >80%, de peu de facteurs pronostiques négatifs pour la survie à long terme (par exemple, insuffisance cardiaque congestive, dépendance à la dialyse et diabète insulino-dépendant) et d’une bonne espérance de vie sont essentiels pour s’assurer que ces patients atteints de SCA bénéficieront de l’intervention.
     
    Une question qui pourrait devoir être réévaluée est que le seuil recommandé pour le taux d’AVC et de mortalité périopératoires (<3 %) chez les patients atteints de SCA subissant une intervention peut être trop élevé. Les lignes directrices de pratique clinique germano-autrichiennes récemment mises à jour recommandaient fortement que les taux d’AVC / décès périprocéduraux pour le SCA soient aussi bas que possible après la pose d’une endoprothèse CEA / artère carotide.

    Selon ces lignes directrices, les taux d’AVC / décès périprocéduraux doivent être surveillés par des neurologues et ne doivent pas dépasser 2% pour le SCA.
     
    La revascularisation de l’artère transcarotide (TCAR) avec inversion dynamique du flux sanguin cérébral est apparue comme une alternative à l’ACE et à la pose d’endoprothèses carotidiennes transférmorales pour la prise en charge des patients carotidiens symptomatiques et asymptomatiques.

    Le TCAR a gagné en popularité et est de plus en plus utilisé dans la pratique clinique quotidienne, mais son rôle dans la prise en charge des patients carotidiens n’a pas encore été défini par des lignes directrices. Le rôle du TCAR et d’autres sujets sont abordés dans un document de mise en œuvre complet distinct par le comité des directives SVS.
     
    En conclusion, des articles clés récents semblent clarifier la prise en charge optimale des patients atteints de SCA.
     
    De toute évidence, il est essentiel que tous les patients atteints de SCA soient placés sous OMT.
     
    Cependant, de nouvelles preuves suggèrent que les patients atteints de sténose asymptomatique sévère (80% à 99%)présentent un risque élevé d’AVC avec OMT seul et devraient être envisagés pour une procédure prophylactique afin de réduire le risque d’un futur événement cérébrovasculaire.
     
     
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    Francois Becker


    Commentaires par François Becker
    MD, PhD, HDR, PU Médecine Vasculaire





    Cet article de Liapis et al
    dans le Journal of Vascular Surgery est un Editorial accompagnant les Recommandations pour la Pratique Clinique de la Société de Chirurgie Vasculaire des Etats Unis (Society for Vascular Surgery, SVS) pour la gestion des artériopathies extra-crâniennes (1).
    Le Journal of Vascular Surgery est le journal de la SVS. Aux USA, 90% des interventions sur les sténoses carotides extra-crâniennes (SC) sont pratiquées sur des SC asymptomatiques. Voilà pour le contexte.

    Dans ces nouvelles guidelines de la SVS, la première recommandation porte sur les SC  asymptomatiques et il est dit que pour les patients à faible risque chirurgical avec SC > 70% asymptomatique il est recommandé une endartériectomie carotide plus traitement médical optimal plutôt que traitement médical optimal seul (1B : niveau de recommandation grade 1, qualité de preuve modérée B). C’est un pas en arrière par rapport aux précédentes recommandations qui privilégiaient le traitement médical optimal (TMO).

    Des recommandations à la pratique de terrain il y a un monde …, et l’on sent bien que Liapis, Eckstein et Paraskevas qui ont beaucoup écrit sur les SC sont un peu le postérieur entre deux chaises [NB : Eckstein est un des auteurs de l’étude SPACE-2 qui a été plombée par le lobby interventionniste sur les SC asymptomatiques (2), Paraskevas a écrit avec Spence grand défendeur du TMO et défend la recherche de SC à sur-risque]

    Le travail de Howard et Rothwell (3) sur lequel Liapis et al s’appuient repose sur un registre en population réputé (Oxford Vascular Study, OxVasc), mais il n’est pas exempt de critiques (4).

    La population étudiée est biaisée, il s’agit de patients adressés pour suspicion d’AIT ou d’AVC dont les patients porteurs de SC jugée asymptomatique ont été inclus dans l’étude (recrutement 2002-2017. 2354 patients suspects d’AIT ou d’AVC dont 2178 patients ont eu une imagerie carotidienne, 207 patients jugés porteurs d’une SC asymptomatique 50-99%), l’âge moyen était par ailleurs élevé (77.5 ans). Il ne s’agit pas d’un recrutement sur l’ensemble de la population du district d’Oxford. Le faible nombre de SC détectées implique des pourcentages avec intervalle de confiance large ce qui amène à prendre l’item AIT+AVC pour augmenter le nombre d’événements ; on peut aussi avoir des doutes sur les pourcentages donnés (6 AVC à 5 ans sur 53 patients avec SC 70-99% = 14.6% ?? – 5 AVC à 5 ans sur 34 patients avec SC 80-99% = 18.3% ??). La nature des événements est discutable : 45% des AIT ou AVC dans le territoire de la SC asymptomatique ont été jugés comme lacunaires ou cardio-emboliques. La notion de TMO est floue (le contrôle de l’hygiène de vie et du tabagisme était jugée non-réalisable, 20% des patients n’avaient pas de statine) ; Abbott dans une lettre au Lancet Neurol considère même que le TMO n’était pas appliqué dans la cohorte OxVasc (5). La progression de la SC vers une SC serrée ou très serrée n’est pas non plus envisagée (1 seul examen). Dans le même registre en 2010 le taux d’AVC ipsilatéral était évalué à 0.34% par an chez les patients porteurs de SC > 50% prenant correctement le TMO. Les auteurs ont complété ce travail par une méta-analyse qui va dans leur sens (les SC 70-99% et surtout 80-99% apparaissent à plus haut risque d’AVC ipsilatéral), mais on en a connu d’autres qui concluaient l’inverse ou faisaient douter de l’intérêt de la chirurgie.

    La 2ème étudeà laquelle Liapis et al se réfèrent (6) est plus intéressante, il s’agit d’une étude suédoise en population générale réalisée à Uppsala initialement en 2007-2009 (4632 patients sur 5581 auxquels un EDC a été proposé), les patients sont plus jeunes (âge moyen 65 ans), les deux tiers ont été réévalués à 70 ans (3057 sur les 4632 initiaux), la progression de la SC a été évaluée. Là aussi les taux de SC serrées sont faibles (31 SC 50-79%, 12 SC 80-99%). Les intervalles de confiance sont larges. Il ressort néanmoins que la progression de la SC est un facteur de risque d’AVC, d’autant plus important que la SC initiale était plus serrée, les SC les plus à risque d’AVC ipsilatéral sont les SC 80-99%.

    Dans la 2ème partie de leur Editorial, Liapis et al insistent sur 4 point-clefs

    1-Les SC asymptomatiques les plus à risque d’AVC ipsilatéral sont les SC 80-99%, pour les SC 50-79% le risque d’AVC sous TMO n’est pas suffisant pour justifier une intervention chirurgicale prophylactique.

    2-Ceci implique que les examens diagnostiques, en particulier l’écho-Doppler, doivent être précis et fiables. Conclure un EDC par sténose carotide > 50% n’a aucun sens, aucun intérêt. Il faut des chiffres de sténose précis en vélocimétrie et en planimétrie !

    3-Le seuil de complications opératoires (AVC, décès) < 3% demandé pour pratiquer une chirurgie carotide n’est plus adapté au TMO actuel. Ce seuil doit être abaissé à < 2%, voire < 1-2%

    4-Clairement tous ces patients doivent être placés sous TMO.

    Le TMO actuel (hygiène de vie + traitement médicamenteux) pour les patients porteurs de SC est le même que pour les patients coronariens, il n’y a pas de demi-mesures, seul le niveau de TA est discuté en fonction du degré de sténose(s).

    Le commentaire de Spence (4), comme d’autres articles de Liapis et Paraskevas, insiste à juste titre au final sur la recherche des SC asymptomatiques à sur-risque neuro-vasculaire.

    800px Transcranial dopplertexte alt Fig1

    Les items les plus validés sont la présence de signaux micro-emboliques (HITS) en Doppler transcrânien, le caractère hypoéchogène-hétérogène ou l’aspect d’hématome intra-plaque, la progression « rapide » du degré de sténose, la réduction homolatérale de la vasoréactivité cérébrale ou la dégradation homolatérale des signaux sylviens. En dehors des HITS qu’on peut avoir avec toute SC, les autres items sont le fait de SC serrées, très serrées.

    Rien de surprenant donc que les SC asymptomatiques 80-99% apparaissent à haut risque d’AVC ipsilatéral. La recherche de ces items doit faire partie de l’examen EDC dés le diagnostic de sténose > 70%-NASCET

    1- AbuRahma et al J Vasc. Surg 2022 Jan

    2- Naylor A.R. Eur J Vasc Endovasc Surg 2016 Jun

    3- Howard D.P.J. et al Lancet Neurol 2021 Mar

    4- Spence J.D. Lancet Neurol 2021 Mar

    5- Abbott A. Lancet Neurol 2021 Sept.

    6- Hogberg D. et al Eur J Vasc Endovasc Surg 2019 Jun

    A lire

    https://medvasc.info/1425-entretien-fran%C3%A7ois-becker-21-10-21-st%C3%A9nose-carotidienne-asymptomatique