Cet article souligne le rôle crucial du conseil préconceptionnel et d'une planification contraceptive efficace pour les femmes en âge de procréer atteintes de maladies cardiovasculaires (MCV).
Ces femmes sont confrontées à des défis particuliers, notamment le risque de prise de médicaments tératogènes et les risques accrus de morbidité et de mortalité pendant la grossesse.
Conseil préconceptionnel et évaluation des risques
Pour les femmes atteintes de MCV, la planification de la grossesse est déterminante. Le conseil préconceptionnel permet une stratification des risques, un ajustement des traitements et une éducation complète des patientes. Les femmes atteintes de MCV prennent souvent des médicaments présentant des risques tératogènes, ce qui rend un conseil précoce et individualisé essentiel pour atténuer les risques potentiels. Malgré l'importance de ces discussions, des études montrent que seulement environ la moitié des femmes atteintes de cardiopathie congénitale se souviennent d'avoir bénéficié de conseils en matière de contraception. 1-3 Cette lacune alarmante souligne la nécessité d'un engagement proactif des équipes de cardiologie, dès l'adolescence et jusqu'à l'âge adulte. Les cardiologues pédiatriques et adultes doivent collaborer pour assurer la continuité des soins et des discussions sur la santé reproductive.
Le conseil préconceptionnel doit impliquer une équipe multidisciplinaire afin de répondre aux préoccupations cardiovasculaires et obstétricales. Une évaluation détaillée des risques, l'identification des risques modifiables, l'optimisation du traitement médical et l'élaboration d'un plan de prise en charge de la grossesse adapté à l'état de santé de la patiente sont des éléments essentiels de cette approche. De plus, l'information de la patiente sur les complications et les risques potentiels pour la mère et le fœtus garantit une prise de décision éclairée et de meilleurs résultats pour la mère et l'enfant .
Méthodes contraceptives
Les options contraceptives doivent privilégier la sécurité et l'efficacité, en particulier dans les groupes à haut risque.
La contraception de niveau I comprend les contraceptifs réversibles à longue durée d'action (LARC), tels que les dispositifs intra-utérins (DIU) et les implants sous-cutanés, et présente un taux d'échec moyen à un an inférieur à 1 %, ce qui les rend très efficaces. Leur profil de sécurité est également supérieur à celui des méthodes de niveaux II et III. DIU hormonaux, en particulier, offrent des avantages supplémentaires aux femmes sous anticoagulants en réduisant les saignements menstruels abondants, une préoccupation fréquente dans cette population. Ces méthodes offrent une contraception fiable sans augmenter significativement les risques cardiovasculaires, ce qui en fait le choix privilégié de nombreuses femmes atteintes de maladies CV
Chez les femmes présentant un risque thromboembolique élevé, les contraceptifs hormonaux combinés (CHC) sont associés à un risque accru de coagulation. Cependant, les CHC peuvent rester appropriés chez certaines patientes sous étroite surveillance. Les méthodes progestatives, telles que les pilules progestatives ou les injectables (efficacité de 9 % contre 6 %), offrent des alternatives aux patientes qui ne peuvent pas utiliser de méthodes contenant des œstrogènes. Un conseil contraceptif efficace doit s'appuyer sur une prise de décision partagée, où les préférences et le mode de vie de la patiente sont soigneusement pris en compte, parallèlement aux recommandations cliniques.
Contraception d'urgence
Les contraceptifs d'urgence sont sous-utilisés chez les femmes atteintes de maladies cardiovasculaires, souvent en raison d'obstacles tels que le coût et l'accès.
Les DIU au cuivre offrent un double avantage : contraception d'urgence et prévention à long terme. Avec un taux d'échec inférieur à 0,1 %, ils constituent la méthode de contraception d'urgence la plus efficace. Cependant, leur utilisation est limitée par la nécessité d'une procédure en cabinet, qui n'est pas toujours immédiatement accessible à toutes les patientes. Les difficultés logistiques et financières affectent de manière disproportionnée les femmes à faibles revenus et vivant en milieu rural, ce qui souligne encore davantage la nécessité d'un accès équitable aux soins de santé .
Les contraceptifs oraux d'urgence, tels que le lévonorgestrel et l'acétate d'ulipristal, constituent des alternatives intéressantes, mais doivent être pris dans les 5 jours suivant un rapport sexuel non protégé. Leur taux d'échec peut varier de 1 % à 3 %. Bien que largement disponibles, leur efficacité diminue avec le temps, l'indice de masse corporelle et les interactions médicamenteuses potentielles, ce qui nécessite un accès rapide et un accompagnement adapté. Un prétraitement par antiémétiques peut être recommandé pour atténuer les effets indésirables tels que les nausées et les vomissements, améliorant ainsi le confort et l'observance du traitement.
La fourniture anticipée d'une contraception d'urgence est sûre chez les femmes atteintes de maladies cardiovasculaires et peut améliorer les taux d'utilisation et réduire l'incidence des grossesses non désirées, en particulier dans les populations à risque élevé.
Interruption de grossesse
Chez les femmes atteintes de maladies cardiovasculaires graves ou d'affections classées IV selon la classification modifiée de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS), l'interruption volontaire de grossesse (IVG) doit être envisagée afin de réduire le risque de morbidité et de mortalité.
Dans ces cas, les risques liés à la poursuite de la grossesse sont souvent supérieurs aux bénéfices potentiels, ce qui nécessite des discussions ouvertes et bienveillantes entre les patientes et leurs équipes soignantes. Les méthodes chirurgicales d'interruption volontaire de grossesse (IVG) sont généralement privilégiées chez les femmes présentant des risques cardiovasculaires importants, comme l'hypertension artérielle pulmonaire ou la cardiomyopathie, car elles permettent un environnement contrôlé et réduisent le stress physiologique associé à l'interruption médicale de grossesse. Elles sont également mieux tolérées que la grossesse et l'accouchement .
Une prise de décision rapide est essentielle pour minimiser les complications, car les risques associés à l'avortement augmentent avec l'âge gestationnel. Une collaboration multidisciplinaire est essentielle pour gérer l'anticoagulation, en équilibrant les risques de saignement et d'événements thromboemboliques. Les cliniciens doivent apporter un soutien empathique et des conseils fondés sur des données probantes pour aider les patientes à prendre ces décisions complexes .
Lutter contre les disparités
Les disparités d'accès à la contraception et aux soins de santé reproductive touchent de manière disproportionnée les femmes fortement touchées par les maladies cardiovasculaires, en particulier celles issues de milieux défavorisés, ruraux ou minoritaires. Les femmes issues de communautés défavorisées sont souvent confrontées à des obstacles tels que le coût, l'absence d'assurance, l'accès limité aux prestataires de soins et les difficultés géographiques. Ces facteurs aggravent les risques de grossesses non désirées chez les femmes déjà exposées à un risque élevé de complications liées à la grossesse .
Pour remédier à ces disparités, des efforts systémiques sont nécessaires, notamment des changements de politique visant à améliorer la couverture des services de contraception, l'expansion des programmes de santé communautaire et une meilleure formation des prestataires de soins. De plus, garantir la disponibilité de services de santé adaptés aux jeunes et culturellement adaptés peut contribuer à combler les lacunes en matière de soins. Les systèmes de santé doivent privilégier un accès équitable aux soins de santé reproductive afin d'améliorer les résultats pour les femmes atteintes de maladies cardiovasculaires et de réduire les disparités en matière de soins .
Soins multidisciplinaires et prise de décision partagée
Une approche cardio-obstétricale collaborative est essentielle pour des résultats optimaux. Ce modèle intègre l'expertise de cardiologues, d'obstétriciens, de médecins généralistes et d'autres spécialistes afin de dispenser des soins complets et centrés sur la patiente. L'évaluation régulière des objectifs de procréation et des besoins en contraception devrait faire partie intégrante des soins cardiovasculaires des femmes en âge de procréer. La prise de décision partagée est un élément fondamental de cette approche, garantissant une implication active des patientes dans leur plan de soins.
Les cliniciens doivent fournir des informations claires et fondées sur des données probantes concernant les risques et les avantages des différentes options contraceptives, permettant ainsi aux patientes de faire des choix éclairés, en accord avec leurs valeurs et leurs objectifs de santé. En favorisant une communication et une collaboration ouvertes, les équipes multidisciplinaires peuvent répondre aux besoins complexes des femmes atteintes de maladies cardiovasculaires et améliorer la qualité globale des soins
Figure 1 : Modèle multidisciplinaire de prise de décision partagée en matière de contraception et de conseil en grossesse pour les femmes souffrant de maladies cardiovasculaires

Reproduit avec l'autorisation de Lindley KJ, Teal SB. Contraception chez les femmes atteintes de maladies cardiovasculaires. JAMA. 2022 ; 328(6) : 577-578. doi : 10.1001/jama.2022.11541.
LARC = contraception réversible à action prolongée ; OB/GYN = obstétricien/gynécologue.
Recommandations d'experts
- Développer la formation : Les cardiologues, tant pédiatriques qu'adultes, doivent être formés pour aborder la sécurité des contraceptifs et les risques liés à la grossesse avec les femmes en âge de procréer. Une formation continue et des ressources sont essentielles pour garantir que les prestataires puissent aborder ces sujets efficacement.
- Commencer par la méthode : Améliorer l’éducation et l’accès à la méthode , en particulier pour les patientes à haut risque. Ces méthodes devraient être privilégiées comme options de première intention pour la plupart des femmes atteintes de maladies cardiovasculaires.
- Recherche avancée : des études complémentaires sont nécessaires pour orienter les recommandations fondées sur des données probantes, notamment dans les cas complexes de maladies cardiovasculaires pendant la grossesse. La recherche devrait se concentrer sur l’optimisation des soins pour les patientes présentant des pathologies complexes.
- Lever les obstacles : Améliorer l’accès aux soins de santé reproductive pour les populations mal desservies grâce à des changements de politiques et à des actions de sensibilisation communautaire. Des solutions innovantes, comme les services de télésanté, peuvent contribuer à combler les lacunes en matière de soins.
Conclusion
Une contraception efficace et une planification de la grossesse sont des éléments essentiels des soins cardiovasculaires pour les femmes. Une approche multidisciplinaire centrée sur la patiente garantit des résultats reproductifs plus fiables et une meilleure qualité de vie pour cette population à risque élevé.
SYNTHÈSE
Le document de l'American College of Cardiology fournit un aperçu complet de la planification contraceptive pour les femmes atteintes de maladies cardiovasculaires (MCV), soulignant l'importance d'une approche multidisciplinaire pour les soins. Il met l'accent sur la consultation préconceptionnelle afin d'évaluer les risques de grossesse, d'ajuster les médicaments tératogènes et d'éduquer les patientes. L'article recommande fortement les contraceptifs réversibles à longue durée d'action (LARC) comme les options les plus efficaces et les plus sûres pour cette population, en particulier pour les femmes atteintes de MCV graves où la grossesse est déconseillée. De plus, il aborde l'utilisation de la contraception d'urgence et discute de l'option de l'interruption de grossesse dans les cas à haut risque. Le texte met également en lumière les disparités en matière d'accès aux soins de santé reproductive et plaide pour des efforts systémiques visant à améliorer l'équité des soins pour les femmes atteintes de MCV. (NotebooKLM)
Commentaire
Prescrire une contraception est un acte médical important qui ne doit jamais se faire à la légère...entre deux portes et ça se voit encore !
Je n'exagère pas, dans la VRAIE VIE, ça existe !
Toujours rechercher des antécédents CV de la patiente et de sa famille au 1° degré avant 60 ans. De plus, toujours rechercher un antécédent de maladie thromboembolique veineuse personnelle ou des parents.
Ces recommandations sont à suivre scrupuleusement.
Prescrire une contraception est un acte médical important.
À LIRE
AINS et PILULE : attention !
Mettre en garde les femmes qui prennent la pilule de ne pas y associer le DICLOFENAC +++++ qui est en VENTE LIBRE ! Risque de MTEV faible, voir minime, mais à éviter.
ATTENTION : en France, le nom commercial du diclofénac est : Voltarène®, Flector® et Artotec®.
https://medvasc.info/archives-blog/ains-et-pilule-attention?highlight=WyJjb250cmFjZXB0aW9uIl0=
CONTRACEPTION ORALE et MTEV
Dans quels cas la pilule combinée est-elle contre-indiquée ?
– chez les femmes victimes d’accident vasculaire cérébral, d’angine de poitrine ou d’un infarctus du myocarde, d’une phlébite (quelle qu’en soit la cause) ou d’une embolie pulmonaire ;– chez les femmes ayant une prédisposition héréditaire acquise à la thrombose artérielle ou veineuse (formation de caillots) confirmée par des anomalies de coagulation à la prise de sang ;– chez les femmes atteintes d’une maladie pouvant augmenter le risque de thrombose artérielle ;– chez les femmes souffrant d’un diabète grave avec complications vasculaires (atteinte de la rétine, des reins ou des artères) ;– chez les femmes dont la tension est supérieure à 160/95 ;– chez les femmes ayant des taux très élevés de lipides dans le sang (cholestérol ou triglycérides) ;– chez les femmes victimes de migraines intenses accompagnées de signes neurologiques (troubles visuels, paralysie d’une main ou du visage, etc.) ;– chez les femmes ayant ou ayant eu une inflammation du pancréas ;– chez les femmes atteintes d’une maladie grave ou d’une tumeur du foie ;– chez les femmes souffrant d’une insuffisance rénale sévère ou aigue ;– chez les femmes ayant ou ayant eu un cancer du sein ou de l’utérus ;– chez les femmes victimes de saignements vaginaux d’origine inconnue.
Les progestatifs d’ancienne génération combinés à un faible dosage d’éthinylestradiol sont associés à un moindre risque thromboembolique veineux et artériel.
– Les pilules progestatives à faible dose peuvent être utilisées sans danger par l’immense majorité des femmes, et notamment par celles présentant des contre-indications à l’usage des pilules combinées. Ce type de contraceptif peut cependant « réveiller » l’acné chez les femmes en ayant eu précédemment. Il peut aussi favoriser une prise de poids chez certaines femmes prédisposées. Enfin, les pilules progestatives entraînent souvent des troubles des règles (saignements entre les règles, règles irrégulières).
Dans tous les cas, afin de choisir le moyen contraceptif qui conviendra le mieux à la femme, il est indispensable de consulter un médecin (généraliste ou gynécologue) ou une sage-femme. La consultation sera l’occasion de rechercher les facteurs de risque de thrombose, comme des problèmes vasculaires préexistants et un tabagisme, d’indiquer à la patiente d’éventuelles contre-indications à la contraception orale et de lui signaler des besoins de surveillance particulière.
https://medvasc.info/archives-blog/contraception-orale-et-mtev#:~:text=Il%20est%20recommand%C3%A9%20qu'un,inciter%20%C3%A0%20consulter%20en%20urgence.
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