EMPATHIE !


« La présence appréhende toujours d’abord comme monde ce qu’elle est elle-même originairement » Biswanger

« Le monde n’est plus, il faut que je te porte. » Paul Celan

"Rien n'est plus important que l'empathie pour la souffrance d'un autre être humain. Rien. Pas une carrière, pas de richesse, pas d’intelligence, et certainement pas de statut. Nous avons  à  nous comprendre les uns les autres si nous voulons survivre dans la dignité." Audrey Hepburn

Le point de départ du moment 

Lajante M, Del Prete M, Sasseville B, Rouleau G, Gagnon MP, Pelletier N. Empathy training for service employees: A mixed-methods systematic review. Formation à l'empathie pour les employés des services : une revue systématique à méthodes mixtes
PLoS One. 2023 Aug 14;18(8):e0289793. doi: 10.1371/journal.pone.0289793. PMID: 37578963; PMCID: PMC10424876.
https://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0289793

"Suite à la montée en puissance de la formation à l'empathie dans la littérature sur les services et à sa demande croissante dans les industries de services, cette étude passe systématiquement en revue les articles empiriques mettant en œuvre et testant des programmes de formation à l'empathie dans divers domaines de services.

Une revue systématique à méthodes mixtes a été réalisée pour identifier et décrire les programmes de formation à l'empathie et discuter de leur efficacité en termes de qualité de service, de bien-être des employés de service et de satisfaction des utilisateurs de services. Les articles inclus répondaient à ces critères d'éligibilité : étude qualitative, quantitative ou à méthodes mixtes ;

une formation en empathie est identifiable ; formation(s) décrite(s) développée(s) ou testée(s) auprès des employés du service traitant avec les utilisateurs du service. Nous avons effectué des recherches dans des bases de données sur la santé, les affaires, l'éducation et la psychologie, telles que CINAHL, Medline ABI/Inform Global, Business Source Premier, PsycINFO et ERIC. Nous avons utilisé l'outil d'évaluation à méthodes mixtes pour évaluer la qualité des articles inclus. Une conception de synthèse convergente basée sur les données a permis l'analyse des données. Au total, 44 études publiées entre 2009 et 2022 ont été incluses.

La présentation narrative des résultats a été regroupée selon ces six dimensions des programmes de formation à l'empathie :
1) pourquoi,
2) qui,
3) quoi,
4) comment,
5) où
(6) quand et combien.

Près de 50 % des études n’incluaient pas de définition de l’empathie. Quatre principales compétences empathiques développées grâce aux programmes de formation ont été identifiées : la communication, l'établissement de relations, la résilience émotionnelle et les compétences en conseil. Les interventions en face à face et en groupe sont répandues. Notre revue systématique montre que les 44 articles identifiés proviennent uniquement de services de santé avec une population prédominante de médecins et d'infirmières. Nous montrons cependant que les quatre compétences empathiques identifiées pourraient être formées et développées dans d’autres secteurs, comme celui des affaires. Il s'agit de la première revue systématique multidisciplinaire et à méthodes mixtes des programmes de formation à l'empathie dans la recherche sur les services.
 
La revue intègre les connaissances des services de santé, identifie les limites et les lacunes de la recherche empirique existante et décrit un programme de recherche pour les recherches futures et les implications pour la recherche sur les services."
 
Un enseignement de l'empathie à l'école !!!!!!!



"Faire le récit de l’évolution du concept d’empathie au xxe siècle permet de constater que celui-ci a profité des travaux effectués par des chercheurs issus de différents courants, non seulement de la psychologie, mais aussi de la philosophie du mouvement interactionniste et des neurosciences cognitives.

Le mot empathie vient du grec eμπatia qui avait le sens de « souffrir avec », qu’on attribue généralement maintenant à la sympathie, avec laquelle l’empathie est trop souvent confondue. Le terme empathie est réapparu au xixe siècle, sous l’appellation Einfühlung utilisé par un philosophe allemand Theodor Lipps en 1903 (texte non traduit de l’allemand). Il désigne alors un processus de communication intuitive avec le monde, opposant un mode de connaissance subjectif de l’univers à la connaissance rationnelle. Dans un tout autre registre, le phénoménologue Husserl (1929) s’est intéressé à la question de l’intersubjectivité et de l’altérité humaines.
 
Grâce à l’empathie, les intentions d’autrui sont accessibles via la capacité d’imiter et d’intérioriser l’expérience d’autrui dans ses propres représentations. Il s’agit d’expliquer comment on peut se mettre à la place de l’autre sans se perdre. C’est le Britannique Titchener qui fait officiellement entrer le terme dans la psychologie anglaise en 1910 en traduisant einfühlung par empathy. Quelques décennies plus tard, Allport et Vernon (1937) définissent l’empathie comme une transposition imaginaire de soi dans la pensée, les affects et les actions de l’autre, à l’aide de l’imitation des postures et des expressions faciales d’autrui…"
 “Si vous êtes en conflit avec une autre personne, la première chose à faire est d’essayer de la comprendre en profondeur. Regarder en profondeur vous montrera sa souffrance et alors vous ne voudrez pas la blesser ou la punir ou la faire souffrir, mais vous l’accepterez telle qu’elle est et vous essayerez de l’aider.” Thich Nhat Hanh, moine.
 
Médecine et empathie 

Définition de l’empathie

Le concept d’empathie a été défini de manière variable selon les auteurs qui l’ont mentionné dans leurs approches (citons ici seulement Freud, 1913 ; Spiro et al., 1993 ; Cosnier, 1994 ; Fivaz-Depeursinge, 2001).

L’on peut schématiser comme suit les divergences de base entre les auteurs quant à la conceptualisation de l’attitude empathique :
* elle se résumerait à une aptitude cognitive du médecin, consistant à se mettre dans la situation du patient tout en gardant une distance émotionnelle ;

* elle serait une réaction émotionnelle involontaire qui dépendrait des programmes biologiques innés réglant les interactions sociales ;

* elle engloberait une composante cognitive et une composante émotionnelle.

Cette troisième piste s’impose à tous ceux qui considèrent les composantes émotionnelles et cognitives comme indispensables à la connaissance de soi, d’autrui et du monde. Comme le dit Damasio (1994), il n’y a pas de cognition sans émotion, ni d’émotion sans cognition.
De manière générale, l’empathie désigne :
la capacité à se mettre à la place d’autrui et à percevoir ses affects (empathie d’affects), à partager ses représentations (empathie de pensée) ou à partager ses actions et réactions (empathie d’action). Les trois aspects peuvent être à certains moments confondus (Cosnier, 1994).
Dans une interaction, chaque partenaire s’identifie corporellement à l’autre par un processus qui, on l’a dit, amène les partenaires à entrer activement en syntonie, mais qui reste souvent subliminaire.
Le partage d’affect s’accomplit ainsi :
 
* par un mécanisme inconscient qui permet d’analyser immédiatement les signaux corporels ;
* par un processus d’échange de signaux traités à un niveau cognitif, rationnel et conscient.
Le processus d’empathie peut dès lors se définir de façon plus précise comme :
le partage synchronique d’états psycho-corporels, c’est-à-dire comme le fait qu’à un même instant, les partenaires de l’interaction vivent et éprouvent un état semblable (Cosnier, 1994).
 
In L 'empathie dans la relation médecin – patient
Marco Vannotti
https://www.cairn.info/revue-cahiers-critiques-de-therapie-familiale-2002-2-page-213.htm

COMPASSION

“La conscience empathique naît du sentiment que les autres, comme nous-mêmes, sont des êtres uniques et mortels. Lorsque nous éprouvons de l’empathie pour une autre personne, c’est parce que nous reconnaissons sa nature fragile et finie, sa vulnérabilité et sa seule et unique vie.” Jeremy Rifkin, économiste et sociologue.


« Dans les langues dérivées du latin le mot compassion signifie que l’on ne peut regarder d’un cœur froid la souffrance d’autrui ; autrement dit : on a de la sympathie pour celui qui souffre. Un autre mot, qui a à peu près le même sens, pitié (en anglais pity, en italien pietà, etc.), suggère même une sorte d’indulgence envers l’être souffrant. Avoir de la pitié pour une femme, c’est être mieux loti qu’elle, c’est s’incliner, s’abaisser jusqu’à elle.
« C’est pourquoi le mot compassion inspire généralement la méfiance ; il désigne un sentiment considéré comme de second ordre qui n’a pas grand-chose à voir avec l’amour. Aimer quelqu’un par compassion, ce n’est pas l’aimer vraiment "

In D'une compassion l'autre
Paul Audi
https://www.cairn.info/revue-du-mauss-2008-2-page-185.htm#:~:text=%C2%AB%20Dans%20les%20langues%20d%C3%A9riv%C3%A9es%20du,sympathie%20pour%20celui%20qui%20souffre.


"La souffrance est un problème très générique, universel. La question qui m’a intéressée était de savoir dans quelle mesure on peut se mettre en relation avec la souffrance des autres, sans se mettre soi-même en situation de détresse, ce qui m’a conduit à examiner la distinction entre empathie et compassion.
 
En quoi cette distinction est-elle pertinente?
 
Elle marque des rapports différents à autrui et à soi-même. Alors que l’empathie fonctionne comme un simple miroir des émotions d’autrui, la compassion implique un sentiment de bienveillance, avec la volonté d’aider la personne qui souffre. J’ai donc conçu des entraînements à la compassion et j’ai constaté que celui-ci a un impact sur l’attitude des participants, en augmentant leur prosocialité, à savoir leur capacité à agir pour le bénéfice d’autrui. Cela s’est vérifié après examen à l’IRM. Les personnes ayant suivi l’entraînement à la compassion affichaient des activités neuronales liées aux émotions positives, même lorsqu’on leur soumettait des images d’individus souffrant.
 
Au contraire, le fait d’être trop empathique vis-à-vis de la détresse d’autrui peut conduire à des réactions similaires à un «burn out», ce qu’on appelle la fatigue empathique.
 
Mais ne faut-il pas un minimum d’empathie pour être sensible à la souffrance d’autrui?
 
L’empathie initiale est nécessaire pour être touché. Mais ensuite il faut de la compassion pour se protéger des émotions négatives générées par l’empathie. Ce passage de l’empathie à la compassion est utile pour que les gens perçoivent eux-mêmes la différence et soient capables de distinguer un état empathique d’un état compationnel"

Olga Klimecki
https://www.unige.ch/lejournal/numeros/93/article1/article1bis/#:~:text=En%20quoi%20cette%20distinction%20est,aider%20la%20personne%20qui%20souffre.
 
 
"Comment se reconstruire lorsque l’existence a été fracassée 
par un drame ? L’affection et l’empathie, le soutien de personnes bienveillantes sont une source majeure de résilience."

Jacques Lecomte
https://www.scienceshumaines.com/l-empathie-source-essentielle-de-resilience_fr_31221.html

"Si nous considérons la résilience comme une aptitude que chacun possède à un
degré ou à un autre, et qui cherche sa voie au travers des difficultés, l’une des
façons de la favoriser – et peut être la meilleure – est d’écarter les obstacles qui
empêchent son épanouissement. Or parmi ceux ci, on trouve une certaine idée
de ce qu’est la souffrance, la maladie, mais aussi… la résilience."

Commentaire, l'expérience médicale dans la VRAIE VIE

“Le grand cadeau des êtres humains est que nous avons le pouvoir de l'empathie, nous pouvons tous ressentir une connexion mystérieuse les uns avec les autres.” Meryl Streep,
 
En médecine EMPATHIE et COMPASSION forme une association synergique, avec l'ECOUTE  l'une ne  va pas sans l'autre......ajoutons la RESILIENCE

T
rilogie magique de la consultation médicale, trilogie indispendable, un passage obligatoire, l'une ne va pas sans l'autre !
 
Comment avoir de l'empathie ou de la compassion sans l'écoute du patient. Suite à l'écoute ,la discussion "a la parole" puis l'empathie et la compassion peuvent être activées et aboutir à la résilience.
 
Mais en 2023, l'écoute des médecins est réduite avec pour conséquence peu de compassion et d'empathie. Le colloque singulier, Hippocratique, a besoin d'un dialogue, sans dialogue la consulation devient une triste "histoire sans parole". Il est vrai que  le médecin "prestataire de service" et demain le robot humanoïde n'auront pas besoin de tout cela.
 
Le discours sera froid et impersonnel; il l'est déjà dans certains cas d'après les patients.
 
De plus en plus les patients se plaignent de l'absence de dialogue avec le médecin, quant à tout le reste c'est totalement superfaitatoire.

Il ne faut pas trop d'empathie, il faut ce qui est nécessaire ,mais chaque patient étant très différent , il faut s'sadapter.

Avec l'expérience et l'intuition qui en découle on perçoit  aisément tout cela, faut-il suivre des cours en médecine  sur l'empathie, l'empathie est INSTINCTIVE en médecine ou alors il faut changer de métier, erreur de casting  et game over ! 
 
L'empathie est -elle un sentiment primitif qui demande qu'à se réveiller ? 

Tact et mesure oui, c'est le bon dosage, mais ne pas avoir d'empathie après plus de 10 ans d'exercice de la médecine .....ça pose question.

Plutôt que d'abrutir les étudiants en médecine de tas de choses inutiles, un éveil psychologique est nécessaire.

Par exemple les jeux de rôles sont une des solutions. Ces derniers sont utilisés en cancérologie pour l'annonce du cancer.

“Quelle est la condition essentielle du dialogue ? C’est la capacité de voir les choses du point de vue de l’autre.” Paolo Flores d’Arcais, écrivain.

« La faculté qu’a l’homme de se creuser un trou, de sécréter une coquille, de dresser autour de soi une fragile barrière de défense, même dans des circonstances apparemment désespérées, est un phénomène stupéfiant qui demanderait à être étudié de près. Il s’agit là d’un précieux travail d’adaptation, en partie passif et inconscient, en partie actif. » Primo Levi

 
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