Détresse des agriculteurs et des pêcheurs, l’impossible équation de la transition énergétique ?
"Nous ne pouvons pas résoudre nos problèmes avec la même pensée que nous avions quand nous les avons créés", disait Albert Einstein, mais c’est exactement ce que nous faisons, encouragés par le chant des sirènes qui profèrent que notre capacité d’innovation a le pouvoir de venir à bout de tous les problèmes. Paul Romer, prix Nobel d’économie (plus exactement prix de la Banque de Suède en sciences économiques en mémoire d’Alfred Nobel) 2018, est convaincu que "l’innovation est la clé pour déverrouiller les portes de la croissance économique durable".
Le moment est venu de tenir un discours responsable, que la majeure partie des humains ne sont pas prêts à entendre, et de mettre en pratique des actions durables, ce que la plupart des individus ne sont pas près d’accepter et que de nombreuses professions de sont pas en mesure d’assumer sans accompagnement.
La COP28 qui s’est tenue à Dubaï en décembre dernier a salué comme une grande victoire le fait que pour la première fois le vocable « combustibles fossiles » a été mentionné dans le communiqué final. Quelle pantalonnade ! Les énergies durables et pseudo-durables ne font que s’additionner à des énergies fossiles dont la consommation mondiale n’a jamais cessé de croître et qui constituent les trois quarts de l’énergie mondiale. Il n’y a pas de réelle substitution !
On continue de se gargariser de la décarbonation de l’économie mondiale avant 2050, mais les gens censés savent pertinemment que c’est impossible, tout simplement parce qu’on ne peut pas tout décarboner. Jean-Baptiste Fressoz, dans son excellent livre "Sans Transition", aborde le sujet de la manière proposée par Einstein, en empruntant d’autres chemins de réflexion, les chemins du bon sens, sans pour autant avoir la prétention de tout résoudre. Il préconise notamment
1. De décarboner ce qui est « décarbonable ».
2. De réduire drastiquement le recours à ce qui ne l’est pas, et notamment de mettre un terme à certains rêves de décarbonation comme l’avion fonctionnant aux huiles usées ou à l’hydrogène, qui ne font que consommer en vain des ressources qui pourraient être utilisées ailleurs.
On aurait ainsi un impact significatif, par exemple, en produisant de très petites voitures et en réduisant drastiquement notre consommation de viande rouge (encore une profession lourdement impactée !).
Les tenants de l’innovation ont raison sur le point 1 ci-dessus, mais sur le point 2 il est urgent et impératif d’utiliser la carotte, pour accompagner les professions impactées, et le bâton, pour faire avancer les récalcitrants.
On en revient ainsi au nerf de la guerre : l’argent. On a beaucoup cru, et on croit toujours, au pouvoir du monde extra-financier, mais il est aujourd’hui une illusion majeure, illustrée par les résultats financiers indécents du secteur des énergies fossiles. Plutôt qu’un rêve de monde extra-financier, il faudrait faire en sorte que le monde financier devienne de facto vertueux, grâce à des réglementations appropriées et globales.
Mais ceci est une autre histoire…