SURDIAGNOSTIC !


“La norme, ce n’est pas simplement, ce n’est même pas un principe d’intelligibilité; c’est un élément à partir duquel un certain exercice du pouvoir se trouve fondé et légitimé.”
Michel Foucault, Les anormaux, Cours au Collège de France, 1974-1975. Paris, Gallimard, 1999, p. 46.
 
“Tandis que l’individu disparaît devant l’appareil qu’il sert, il est pris en charge mieux que jamais par cet appareil même.” Max Horkheimer et Theodor W. Adorno, 1944, La dialectique de la raison. Paris, Gallimard, 1974, p. 17
 
https://www.cairn.info/revue-champ-psychosomatique-2006-2-page-55.htm

« La présence du thérapeute dans la relation rend possible un compte-rendu de la réalité qui ne soit ni objectivation ni arbitraire. La capacité du thérapeute à être présent garantie, non pas une impossible objectivité, ni le déterminisme de chaînes de causalité, mais la possibilité d’une relation. Au lieu d’aspirer à une objectivité à partir de laquelle nous nous libérerions nous-mêmes, nous pouvons apprendre à rendre compte de notre étant-là, d’êtres humains dans une relation » Alberto MELUCCI

Taduction intégrale de cet article important sur les SURDIAGNOSTIC, sur les excés en tout genre en médecine 

Overdiagnosis and too much medicine in a world of crises
Surdiagnostic et trop de médicaments dans un monde en crise
Thomas Kühlein1, Helen Macdonald2, Barnett Kramer3, Minna Johansson4, Steven Woloshin45, Kirsten McCaffery6, John B. Brodersen7, Tessa Copp8, Karsten Juhl Jørgensen9, Anne Møller10, Martin Scherer11for the Scientific Committee of the Preventing Overdiagnosis Conference
1Institute of General Practice, Universitätsklinikum Erlangen, Germany
2The BMJ, London, United Kingdom
3The Lisa Schwartz Foundation for Truth in Medicine Norwich, VT/USA
4Global Center for Sustainable Healthcare, Gothenburg, Sweden
5Dartmouth Institute for Health Policy and Clinical Practice, Lebanon, NH/USA
6Sydney Health Literacy Lab, Wiser Healthcare, Faculty of Medicine and Health, School of Public Health, The University of Sydney, Sydney, NSW, Australia
7Centre of Research & Education in General Practice, Department of Public Health, Faculty of Health Sciences, University of Copenhagen; Primary Health Care Research Unit, Region Zealand and Research Unit for General Practice, Department of Community Medicine, Faculty of Health Sciences, UiT The Arctic University of Norway, Tromsø Odense University Hospital Odense, Denmark and Cochrane Collaboration, Oxford, United Kingdom
8Wiser Healthcare, Faculty of Medicine and Health, School of Public Health, The University of Sydney, Sydney, NSW, Australia
9Herrestads Healthcare Centre, Närhälsan, Denmark; Global Center for Sustainable Healthcare, Gothenburg Denmark; University, FoUUI Fyrbodal, Cochrane Sweden
10Centre of Research & Education in General Practice, Department of Public Health, Faculty of Health Sciences, University of Copenhagen; Primary Health Care Research Unit, Region Zealand, Denmark
11Institut and Polyclinic of General Practice, Universitätsklinikum Hamburg Eppendorf, Hamburg, Germany
12Preventing Overdiagnosis Conference.

BMJ 2023; 382 doi: https://doi.org/10.1136/bmj.p1865 (Published 12 August 2023)
Cite this as: BMJ 2023;382:p1865
 
Curieusement aucun français parmi les auteurs .......et pourtant en France le SURDIAGNOSTOC on connaît !!!!!!!!!
 
 
S'attaquer au surdiagnostic créera des soins de santé plus durables pour les personnes et la planète
 
De nombreux systèmes de santé sont confrontés à des crises de demande excédentaire, de prévalence accrue de maladies chroniques, de coûts en spirale et de problèmes de main-d'œuvre qui menacent leur fonctionnement.
 
Des preuves récentes suggèrent qu'une partie de l'augmentation de la prévalence de la « maladie » est due au surdiagnostic, au surtraitement et à des soins globalement de faible valeur.
 
On estime que 30 % des soins médicaux sont de faible valeur ou gaspillent des ressources, et 10 % sont nocifs. 
 
On estime que le secteur de la santé représente plus de 5 % des émissions de gaz à effet de serre dans les pays industrialisés – une autre façon dont les soins de faible valeur menacent la santé. 
 
Il faut plus de capacité dans les soins de santé, plus d'investissements dans les soins de santé et plus de personnel dans certaines régions, et des spécialités pour améliorer la santé, le bien-être et les inégalités.
 
Cependant, l'expansion exponentielle du territoire médical au cours du dernier demi-siècle est devenue insoutenable, entraînant une flambée des coûts des soins de santé, une charge de traitement déraisonnable pour les patients, un épuisement professionnel du personnel soignant et un préjudice substantiel pour la planète.
 
Nous avons besoin d'une réflexion et d'une discussion plus approfondies sur les ressources financières, humaines, sociétales et planétaires limitées disponibles pour les soins de santé et sur une meilleure répartition des ressources existantes.
 
Les crises actuelles dans la prestation des soins de santé sont exacerbées par le vieillissement des populations et la multimorbidité associée.
 
Les décideurs politiques, les politiciens et le public doivent comprendre comment même des efforts bien intentionnés pour fournir des soins de santé plus nombreux et de meilleure qualité amplifient et renforcent inévitablement ces crises par le surdiagnostic, la surmédicalisation et le surtraitement, détournant les ressources d'options plus efficaces. 
 
Ces questions doivent être résolues si nous voulons parvenir à des soins de santé durables.
 
Être ouvert à la possibilité d'un excès de soins de santé, surveiller les signes et prendre des mesures pour le réduire contribuera à garantir que toutes les étiquettes de diagnostic sont significatives et que les tests et les traitements confèrent des avantages cliniquement pertinents. Cela aidera également les décideurs à investir leur temps et leurs ressources dans des soins de santé de grande valeur, plutôt que dans des dépistages, des technologies, des produits ou des interventions incertains ou nocifs.
 
Contrôler les excès de soins

Réduire le surdiagnostic est une première étape essentielle pour contrôler les soins de santé excédentaires. Les cliniciens, leaders d'opinion et autres personnes qui identifient des excès médicaux ont le devoir de partager leurs connaissances et de travailler pour changer les mentalités et les pratiques.
 
Ce travail est transversal à l'ensemble de la santé. Par exemple, le renforcement des soins primaires dans les systèmes de santé peut réduire le surdiagnostic et améliorer la continuité des soins, tandis que la santé publique est la mieux placée pour revoir les programmes de dépistage. 
 
Les messages concernant les soins de faible valeur peuvent être diffusés via les médias traditionnels, ou de manière plus informelle via les médias sociaux.
 
Le concept de surdiagnostic devrait être enseigné dans le cadre des soins de santé fondés sur des données probantes dès les premières étapes de la formation médicale.
 
Des opportunités et des ressources éducatives sur le surdiagnostic, les soins de santé fondés sur des preuves et la pensée critique devraient également être proposées aux législateurs, aux décideurs et à leur personnel, ainsi qu'aux patients et au public. Cet enseignement doit être opportun, engageant, convaincant et exploitable. Des défis subsistent pour communiquer l'ampleur du surdiagnostic et illustrer le coût humain, par exemple en mettant des visages et des histoires individuelles sur des concepts et des données abstraits. 
 
Le potentiel de surdiagnostic est toujours présent dans les soins de santé et la communauté doit publier de nouveaux exemples à mesure qu'ils surviennent. Les programmes de dépistage établis devraient être réévalués à la suite de nouveaux développements tels qu'une prévention primaire efficace, des changements dans les populations éligibles ou la disponibilité de meilleurs traitements pour les maladies symptomatiques. Par exemple, à mesure que la prévalence du tabagisme diminue, les incidences de rupture d'anévrisme de l'aorte abdominale et de cancer du poumon diminuent également; les vaccinations infantiles contre le VPH réduisent l'incidence de la dysplasie cervicale et du cancer.  Les deux ont des implications pour le rapport bénéfice/risque des programmes de dépistage.
 
Les services et les interventions qui sont redondants, de faible valeur ou nuisibles doivent être systématiquement identifiés et déclassés.
 
Notre culture médicale mondiale a conduit à des tests de diagnostic excessifs, à une surmédicalisation et à un surtraitement dans de nombreuses conditions qui peuvent nuire aux patients, épuiser les ressources de soins de santé et nuire à la planète.
Nous appelons les décideurs locaux, nationaux et internationaux à reconnaître plus clairement et ouvertement ces problèmes et à prendre des mesures urgentes pour les résoudre. Ce n'est qu'alors que nous pourrons espérer créer des soins de santé plus durables à l'avenir.


Commentaire 

Prévention Quaternaire , l'arme antisurdiagnostic et surmédicalisation, l'examen clinique pratiqué selon des régles de bonnes pratiques  avec du bon sens clinique réduit le risque de surdiagnostic. L'examen clinique à l'emporte piéce, on ouvre le parapluie et on surprescrit la biologie, l'imagerie et un traitement totalement inutile et potentiellement dangreux.

"Selon le Wonca International Dictionary for General/Family Practice, la prévention quaternaire est : "l'action menée pour identifier le patient à risque de surmédicalisation, le protéger d'une nouvelle invasion médicale et lui proposer des interventions éthiquement acceptables". Marc Jamoulle a initialement proposé ce concept, et les cibles étaient principalement des patients malades mais sans maladie. La définition a subi une modification récente en tant que "" une mesure prise pour protéger des individus (personnes / patients) contre des interventions médicales susceptibles de causer plus de mal que de bien" 
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/books/NBK537222/

Voici quelques exemples de stratégies de prévention couramment utilisées :

Primordial:

Politique gouvernementale : augmentation des taxes sur les cigarettes ; Diminution de la publicité pour le tabac 
Environnement bâti : Accès à des sentiers pédestres sécuritaires; accès à des magasins proposant des options alimentaires saines

Primaire:
Immunisations 
Programmes d'abandon du tabac
Programmes d'échange de seringues 
Programmes de supplémentation en micronutriments

Secondaire:

Frottis de Papanicolaou (Pap) pour la détection précoce du cancer du col de l'utérus 
La mammographie, pour la détection précoce du cancer du sein
Les coloscopies, pour la détection précoce du cancer du côlon
Dépistage de la tension artérielle

Tertiaire:

Ergothérapie et kinésithérapie chez les brûlés
Rééducation cardiaque chez les patients post-infarctus du myocarde
Soins des pieds diabétiques

Quaternaire :

 Les conditions suivantes sont susceptibles de surtraitement :
Incidentalomes radiologiques 
Surdiagnostic et sous diagnostic dépistage cancer du sein, ça existe 
L'utilisation de médicaments antiarythmiques après un infarctus du myocarde qui réduit les arythmies mais augmente la mortalité
L'utilisation de l'hormonothérapie substitutive a entraîné une augmentation du nombre de cas de cancers du sein, d'accidents vasculaires cérébraux et d'événements thromboemboliques. C'était aussi un échec dans la réduction de la mortalité cardiovasculaire. 
Symptômes médicalement inexpliqués
Troubles fonctionnels
Syndrome de détresse corporelle 
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/books/NBK537222/


PREVENTION QUATERNAIRE, 
Prévention Quaternaire : Revue Médicale Suisse  Libre d'accès   https://www.revmed.ch/view/555116/4443009/RMS_430_1052.pdf

Rappel Utile
PrevPREVPrevhttps://phprimer.afmc.ca/fr/partie-i/chapitre-4/

Comment éviter la surmédicalisation et les surdiagnostics  ?

Tout d'abord en ne rélisant pas les 30 à 40% d'examens d'imagerie médicales inutiles (échographie, scanner, IRM, isotopiques) 

 
La prévention quaternaire c'est la PERTINENCE des SOINS elle-même une émanation du "choose wisely", la PERTINCE des SOINS =  la prévention quaternaire

"L’acte médical pertinent est celui qui convient au malade à un moment donné, c’est le plus adapté et le plus efficace. L’objectif final est d’améliorer l’état de santé du malade et de limiter les risques et les contraintes. C 'est déviter une sur-médicalisation pouvant entraîner des gestes inutiles en cas se surdiagnostics.  La stratégie médicale pertinente consiste à prescrire et à programmer chacun des actes dans un ordre approprié, adapté à chaque situation clinique, compte tenu des disponibilités des ressources de santé, dans un esprit d’efficience, qu’il s’agisse du diagnostic ou de la thérapeutique. La pertinence des stratégies médicales s’insère dans le contexte général de la pertinence des soins qui inclut d’autres paramètres échappant aux seules responsabilités médicales. Elle est la base de la médecine sobre qui dans une approche humaniste soigne mieux au moindre coût ("Académie Nationale de Médecine, Rapport 8/04/2013).

La PERTINENCE des SOINS peut se résumer de la manière suivante :

Face à un patient qui présente une affection diagnostiquée il faut toujours se poser les questions suivantes :

La prescription d’un examen para clinique quel qu’il soit va-t-elle me donner un renseignement utile pour ce patient ?
Cet examen ne fait-il pas double emploi avec les examens précédemment réalisés ?
Eviter les examens dangereux inutiles
Eviter la sur - médicalisation
Proposer des soins éthiques et médicalement acceptables
Est-ce qu’en fonction des résultats ,ma conduite diagnostique et ou thérapeutique seront t-elles modifiées ?
La prescription d’un traitement quel qu’il soit va-t-elle être utile ou inutile chez ce patient
Ne va -t-elle pas être dangreuse ? 
Est ce que j'ai évalué lors de cette prescription les interactions avec le traitement en cours?
Ma démarche est-elle conforme aux recommandations actuelles ?

La PERTINENCE des SOINS c’est la bonne prescription (biologie, imagerie , traitement etc.) au bon moment pour le bon patient. Ce paramètre doit faire partie de votre décision médicale pour tous les patients.Un soin est qualifié de pertinent lorsqu’il est dispensé en adéquation avec les besoins du patient, conformément aux données actuelles de la science, aux recommandations de la Haute Autorité de Santé (HAS) et des sociétés savantes, nationales et internationales.

C’est une notion évolutive car un soin pertinent hier peut ne plus l’être aujourd’hui du fait de l’évolution des connaissances, des techniques et de l’organisation des soins.

Il ne s'agit pas d'un rationnement des soins, il s'agit d'éviter la médecine "Mille Feuilles" qui empilent les examens les uns sur les autres, sans aucune logique et le plus souvent pour rien.
 
Prescrire la dernière molécule à la mode qui ne ferait mieux que l'ancienne c'est une erreur.

Aujourd'hui la Pertinence des Soins est un paramètre important pour notre exercice et dans la décision médicale. Les textes de recommandations sont destinés à argumenter auprès du patient sur l'inutilité de tel ou tel examen. ou de tel ou tel traitement. Les associations de patients, sont des acteurs majeurs de la pertinence des soins, ce dernier point est très important

Réinventer la médecine oui mais avec les patients et dans la pertinence des soins.
Si on revient à la notion de PREVENTION QUATERNAIRE , ça match avec la PERTINENCE des SOINS et ça limite  le urdiagnostic et le surtaitement. Mais attention le sous diagnostic est aussi dangereux quer le sur diagnostic comme l'est le sous traitement et le sur traitement.