Prise en charge des saignements et des procédures invasives sous AntiXI(a)



"Conserver la santé et guérir les maladies : tel est le problème que la médecine a posé dès son origine et dont elle poursuit encore la solution scientifique. " Plutarque

"Anticiper le malheur sans faire partager les affres de l’anticipation, là est le véritable héroïsme. " Daniel Pennac


 
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Management of bleeding and invasive procedures in patients treated with anti–factor XI(a) anticoagulants: proposals from the French Working Group on Perioperative Haemostasis and French Society of Thrombosis and Haemostasis . Prise en charge des saignements et des procédures invasives chez les patients traités par anticoagulants anti-facteur XI(a) : propositions du Groupe de travail français sur l'hémostase périopératoire et de la Société française de thrombose et d'hémostase,
Godier, Anne et al.  Research and Practice in Thrombosis and Haemostasis, Volume 9, Issue 3, 102860

https://www.rpthjournal.org/article/S2475-0379%2825%2900184-0/fulltext
Article libre d'accès
 
Contexte

Plusieurs agents anti-FXI(a) aux mécanismes d'action et aux propriétés pharmacologiques distincts sont actuellement en développement clinique.
 
Bien que ces anticoagulants ne soient pas encore disponibles, nous devons prendre en compte la gestion du risque hémorragique chez les patients déjà inclus dans des essais de phase III.
 
Ces patients peuvent être confrontés à des interventions invasives programmées ou non planifiées et à des saignements en prévision de l'autorisation de mise sur le marché. L'expérience acquise dans la prise en charge de patients présentant un déficit héréditaire en FXI, ainsi que les données des premiers essais cliniques, suggèrent que le risque hémorragique associé aux anti-FXI(a) est probablement faible, mais peut varier selon la situation clinique. Les options de neutralisation des anti-FXI(a) comprennent l'acide tranexamique, les concentrés de FXI et le facteur VII activé recombinant. Cependant, ces options ne sont pas toujours adaptées, peuvent être coûteuses et peuvent comporter un risque thrombotique.
 

Objectifs

 
Le groupe d'intérêt en hémostase périopératoire (GIHP) et la Société Française de Thrombose et d'hémostase (SFTH) ont pour objectif de développer des propositions pour gérer les saignements et les procédures invasives chez les patients traités par anticoagulants ciblant le facteur XI ou XIa (anti-FXI(a)).
 

Méthodes

 
Revue de la littérature et élaboration de lignes directrices pratiques par un groupe d’experts.
 

Résultats

 
Nous proposons des recommandations pragmatiques pour optimiser la sécurité des patients traités par anti-FXI(a), en tenant compte des risques de saignement et de thrombose, du mécanisme d'action du médicament et des options d'inversion disponibles.
 

Conclusion

Ces propositions seront réévaluées à mesure que davantage de données seront disponibles. La mise en place d'un registre pour la gestion des anticoagulants anti-FXI(a) chez les patients subissant des interventions invasives ou présentant des complications hémorragiques est nécessaire.

Essentiel

 
La gestion du risque hémorragique chez les patients sous anti-FXI(a) manque de protocoles pratiques clairs.
 
L’expérience suggère que l’anti-FXI(a) présente un faible risque de saignement, mais ses options d’inversion soulèvent des questions.
 
Dans le cadre de la gestion des risques, les experts proposent des lignes directrices utilisant les données d’essai et le déficit en FXI.
 
Les options ci-dessus aident les cliniciens dans les cas non étudiés et mettent en évidence les lacunes de la recherche.
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EXTRAIT

Prise en charge des saignements chez les patients traités par anticoagulants anti-FXI(a)

La prise en charge dépend de la gravité du saignement.
 
Les saignements non sévères sont traités de manière symptomatique et étiologique sans correction de l'hémostase.
 
En cas de saignement persistant, l'administration de TXA est suggérée .
 
À l'inverse, en cas d'hémorragie sévère, les traitements symptomatiques et étiologiques sont systématiquement associés au TXA. La durée du traitement par TXA n'est pas établie, mais pourrait être de plusieurs jours, notamment lorsqu'il est utilisé seul et chez les patients traités par ASO.
 
La mesure de l'aPTT guide la prise en charge : un aPTT normal est peu susceptible d'être associé à un niveau élevé d'anticoagulation et conduit à une prise en charge standard.
À l'inverse, un allongement du TCA peut indiquer la présence d'un anticoagulant, mais ne renseigne pas sur sa concentration ni sur son niveau d'anticoagulation. De plus, un allongement du TCA peut également résulter d'autres causes que la présence d'anti-XI(a) (coagulopathie hémorragique, anticoagulant lupique, etc.).
 
Pour l’inversion, les mêmes options que pour les procédures invasives sont suggérées :
 
Pour le traitement avec de petites molécules et des mAB, le rFVIIa est proposé.
 
Pour les ASO, l'administration de faibles doses de concentrés de FXI entraîne une inversion partielle de l'effet anticoagulant. Cependant, il peut être associée à un risque thrombotique, en particulier chez les patients présentant des facteurs de risque cardiovasculaire. Une mesure biologique des concentrations plasmatiques de FXI peut être envisagée après l'administration de concentrés, notamment en cas de saignements persistants ou récurrents. Le rFVIIa constitue une alternative aux concentrés de FXI.
 
En conséquence, le moment de l'inversion varie en fonction de la gravité du saignement : pour les événements hémorragiques qui menacent le pronostic vital ou fonctionnel et ne peuvent être rapidement contrôlés par des mesures standard, ou pour le choc hémorragique, un traitement urgent est nécessaire, tandis que pour d'autres événements hémorragiques graves, l'inversion doit être envisagée si le saignement persiste malgré une intervention hémostatique ou si aucune intervention hémostatique n'est possible pour contrôler le saignement.
 
La question de la thromboprophylaxie veineuse pharmacologique après des interventions invasives ou des saignements n'est pas résolue.
 
L'héparine de bas poids moléculaire pourrait être envisagée, notamment si les traitements à base de petites molécules comme le milvexian ou l'asundexian sont interrompus et que des concentrés de rFVIIa ou de FXI sont administrés.

 Reprise du traitement anti-FXI(a). La reprise du traitement anti-FXI(a) après une intervention chirurgicale ou une hémorragie grave est mal documentée.

 
Dans le cas des petites molécules, les stratégies thérapeutiques pour la FA ou la thromboembolie veineuse (TEV) seraient les mêmes que pour les AOD. Après des interventions à haut risque hémorragique, l'anticoagulation thérapeutique est généralement reprise dans les 48 à 72 heures. Après une hémorragie sévère, les mêmes intervalles sont généralement proposés une fois l'hémorragie contrôlée. Après une hémorragie intracérébrale (HIC), la question reste entière. Pour la thromboembolie veineuse, l'héparine de bas poids moléculaire pourrait être envisagée en thromboprophylaxie veineuse jusqu'à la reprise du traitement par anti-FXI(a).
Avec un traitement anti-FXI(a) à action prolongée (c'est-à-dire des oligonucléotides ou des mAB), les patients restent anticoagulés par le médicament quelle que soit la prise en charge.
 

Conclusion

Les options mentionnées ci-dessus ne sont que des suggestions, appuyées par un faible niveau de preuve. Elles visent à aider les cliniciens confrontés à ces molécules dans des situations n'ayant pas fait l'objet d'une évaluation rigoureuse. Elles visent également à identifier les « lacunes de recherche à combler » dans la prise en charge de ces patients. Ces suggestions seront réévaluées à mesure que de nouvelles données seront publiées et que la mise en place d'un registre pour la prise en charge des anticoagulants anti-FXI(a) en cas de procédures invasives ou de complications hémorragiques est nécessaire

 
 
SYNTHESE
Ce document présente les propositions du groupe de travail français sur l'hémostase périopératoire et de la Société Française de Thrombose et d'Hémostase pour la gestion des saignements et des procédures invasives chez les patients sous anticoagulants anti–facteur XI(a). L'article souligne le besoin de protocoles clairs pour cette nouvelle classe d'anticoagulants, dont le risque hémorragique est potentiellement plus faible que d'autres options, mais dont la réversibilité est moins établie. S'appuyant sur l'expérience des déficits héréditaires en FXI et les données d'essais cliniques préliminaires, les auteurs proposent des stratégies de laboratoire et de prise en charge pratique, y compris l'utilisation d'agents pro-hémostatiques. En proposant ces dernières, ils reconnaissent la nécessité de réévaluer ces recommandations à mesure que de nouvelles données émergent. (NotebooKLM)

 

" Les anti-XI(a) offrent la promesse d’une anticoagulation plus sûre, avec un risque hémorragique réduit, mais leur efficacité dans la prévention des événements thromboemboliques majeurs reste à confirmer dans certaines indications." Leur place future dépendra des résultats des essais de phase 3 en cours et de leur capacité à démontrer un rapport bénéfice/risque supérieur aux anticoagulants actuels "PERPLEXITY

 
A LIRE

Inhibiteurs du facteur XI ; future proche ? 
 
XXII
https://medvasc.info/archives-blog/inhibiteurs-du-facteur-xi-futur-proche

A relire sur les inhibiteurs des Anti XI 
https://medvasc.info/1897-manuel-monreal-%C3%A0-retenir-pour-2022

UN ANTI-XI ORAL EN PRÉVENTION DE LA THROMBOSE APRÈS CHIRURGIE DE PROTHÈSE TOTALE DE GENOU
https://www.portailvasculaire.fr/node/81654

Le point sur les anti XI(a) avec PERPLEXITY/IA

Où en est-on avec les anti-XI(a) ?

Résumé actuel du développement et des perspectives :

Les inhibiteurs du facteur XIa (anti-XI[a]) représentent une nouvelle génération d’anticoagulants, conçus pour réduire le risque thrombotique tout en limitant le risque hémorragique, un enjeu majeur des traitements anticoagulants actuels156. Plusieurs molécules sont en développement, notamment l’asundexian, le milvexian (petites molécules orales), et l’abelacimab (anticorps monoclonal).

Points clés issus des dernières études

  • Efficacité et sécurité :

    • Les anti-XI(a) ont montré, dans des études de phase 2 et 3, une réduction significative des complications hémorragiques par rapport aux anticoagulants oraux directs (AOD) classiques comme l’apixaban1.

    • Cependant, dans l’essai de phase 3 OCEANIC-AF (asundexian vs apixaban chez des patients avec fibrillation auriculaire), une augmentation préoccupante du nombre d’AVC et d’événements emboliques a été observée sous asundexian (presque 4 fois plus qu’avec l’apixaban), malgré une réduction des saignements. L’essai a été interrompu prématurément, jetant un doute sur l’intérêt de cette classe dans cette indication.

    • Pour le milvexian, les résultats dans la prévention de la thrombose après arthroplastie du genou sont prometteurs, avec une efficacité comparable ou supérieure à l’énoxaparine et un profil hémorragique favorable, mais il reste à démontrer son intérêt dans d’autres indications5.

  • Place concrètement clinique :

    • Les anti-XI(a) pourraient trouver leur place dans des situations où le risque hémorragique est particulièrement préoccupant, mais leur efficacité dans la prévention des événements thromboemboliques majeurs reste à confirmer dans des indications larges comme la fibrillation auriculaire138.

    • L’abelacimab, notamment, a montré dans l’étude AZALEA-TIMI 71 une efficacité comparable au rivaroxaban dans la FA, avec une diminution spectaculaire des saignements, mais les résultats détaillés et leur impact sur la pratique restent à préciser

  • Surveillance biologique et impact sur la biologie :

    • Les anti-XI(a) n’exigent pas de surveillance biologique systématique, mais peuvent influencer certains tests de coagulation, ce qui nécessite une adaptation des pratiques de laboratoire4.

Conclusion

Après des débuts jugés très prometteurs, les anti-XI(a) sont aujourd’hui confrontés à des résultats cliniques mitigés, en particulier dans la fibrillation auriculaire. En effet, l’efficacité sur la prévention des AVC n’a pas été démontrée de façon satisfaisante pour certains agents comme l’asundexian. Leur place future pourrait se limiter à des indications de niche ou à des populations spécifiques à haut risque hémorragique, en attendant les résultats définitifs des essais en cours avec d’autres molécules de la classe.

La recherche se poursuit, mais l’enthousiasme initial est tempéré par la nécessité de mieux définir le rapport bénéfice/risque de ces nouveaux anticoagulants.

On peut rajouter une question : le coût ? 
AntiXI(a) : des indications "niches"


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