MTEV

  • Covid-19 : complications thrombotiques artérielles et veineuses
     iconographie : Thrombose
     
    "Au milieu de chaque crise, se trouve une grande opportunité" -Albert Einstein

    Covid-19: «Jamais je n'aurais cru que la crise durerait aussi longtemps», confiait Jean-François Delfraissy


    Association of COVID-19 With Major Arterial and Venous Thrombotic Diseases: A Population-Wide Cohort Study of 48 Million Adults in England and Wales,
    Association de COVID-19 avec les maladies thrombotiques artérielles et veineuses majeures : une étude de cohorte à l'échelle de la population de 48 millions d'adultes en Angleterre et au Pays de Galles, 
     Knight, Rochelle et Coll, Circulation Numéro : Volume 146(12), 20 September 2022, p 892-906
    Article libre d'accés
    Contexte

    L'infection par le coronavirus 2 du syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS-CoV-2) induit un état prothrombotique, mais les effets à long terme du COVID-19 sur l'incidence des maladies vasculaires ne sont pas clairs.

    Méthodes 

    Nous avons étudié les maladies vasculaires après le diagnostic de COVID-19 dans des dossiers de santé électroniques anonymisés en anglais et en gallois liés à l'échelle de la population du 1er janvier au 7 décembre 2020. Nous avons estimé les rapports de risque ajustés comparant l'incidence des thromboses artérielles et des événements thromboemboliques veineux (MTEV) après le diagnostic de COVID-19 avec l'incidence chez les personnes sans diagnostic de COVID-19. Nous avons effectué des analyses de sous-groupes selon la gravité de la COVID-19, les caractéristiques démographiques et les antécédents.

    Résultats 

    Parmi 48 millions d'adultes, 125 985 ont été hospitalisés et 1 319 789 n'ont pas été hospitalisés dans les 28 jours suivant le diagnostic de COVID-19.


    En Angleterre, il y a eu 260 279 premières thromboses artérielles et 59 421 premières MTEV pendant 41,6 millions de personnes-années de suivi.

    Les rapports de risque ajustés pour la première thrombose artérielle après le diagnostic de COVID-19 par rapport à l'absence de diagnostic de COVID-19 ont diminué de 21,7 (IC à 95 %, 21,0-22,4) la semaine 1 après le diagnostic de COVID-19 à 1,34 (IC à 95 %, 1,21-1,48) au cours des semaines 27 à 49. Les rapports de risque ajustés pour le premier MTEV après le diagnostic de COVID-19 ont diminué de 33,2 (IC à 95 %, 31,3-35,2) à la semaine 1 à 1,80 (IC à 95 %, 1,50-2,17) au cours des semaines 27 à 49. Ajusté les rapports de risque étaient plus élevés, plus longtemps après le diagnostic, après un COVID-19 hospitalisé par rapport à un COVID-19 non hospitalisé, chez les Noirs ou les Asiatiques par rapport aux Blancs, et parmi les personnes sans versus avec un événement précédent. Les augmentations estimées pour l'ensemble de la population du risque de thromboses artérielles et de MTEV 49 semaines après le diagnostic de COVID-19 étaient de 0,5 % et 0,25 %, respectivement, correspondant à 7200 et 3500 événements supplémentaires, respectivement, après 1,4 million de diagnostics de COVID-19.

    Conclusions

    L'incidence relative élevée d'événements vasculaires peu après le diagnostic de COVID-19 diminue plus rapidement pour les thromboses artérielles que pour les MTEV. Cependant, l'incidence reste élevée jusqu'à 49 semaines après le diagnostic de COVID-19. Ces résultats soutiennent les politiques de prévention de la COVID-19 grave au moyen de vaccins contre la COVID-19, d'un examen précoce après la sortie, du contrôle des facteurs de risque et de l'utilisation d'agents préventifs secondaires chez les patients à haut risque.

    Ce qui est nouveau ?
    • Dans une étude de cohorte de 48 millions d'adultes en Angleterre et au Pays de Galles, le COVID-19 a été associé à une incidence excessive substantielle de thromboses artérielles et de thromboembolie veineuse, qui a diminué avec le temps à partir du diagnostic de COVID-19.
    • L'incidence excessive était plus élevée, pendant une plus longue période, après COVID-19 hospitalisé que non hospitalisé.
    • Il y a eu environ 10 500 thromboses artérielles et événements thromboemboliques veineux en excès après 1,4 million de diagnostics de COVID-19.

    Quelles sont les implications cliniques ?
    • Les stratégies de prévention des événements vasculaires après le COVID-19 sont particulièrement importantes après un COVID-19 sévère entraînant une hospitalisation et doivent inclure un examen précoce des soins primaires et de la gestion des facteurs de risque.
    • Après un COVID-19 sévère, les personnes à haut risque d'événements vasculaires doivent se voir prescrire des thérapies préventives et être conseillées sur l'importance de les respecter.
    • De nouvelles stratégies de traitement simples pour réduire la thromboembolie veineuse associée à l'infection et les thromboses artérielles sont nécessaires.

    L'infection par le coronavirus 2 du syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS-CoV-2), qui cause le COVID-19, induit un état prothrombotique et pro-inflammatoire qui peut augmenter le risque de troubles thrombotiques graves.

    La plupart des études antérieures suggèrent des augmentations marquées immédiates des événements thromboemboliques artériels (en grande partie infarctus du myocarde [IM] et AVC) et veineux (MTEV), bien que les chiffres puissent être exagérés en raison du dépistage universel du COVID-19 dans toutes les admissions à l'hôpital (y compris pour la thrombose), de la surveillance de la thrombose veineuse dans les cohortes COVID-19 ou de la sous-utilisation de la thromboprophylaxie.

    Cependant, peu d'études ont quantifié les risques vasculaires à long terme après le diagnostic de COVID-19 ou ont exploré comment ces risques diffèrent selon des caractéristiques clés telles que l'âge, le sexe, la race ou des comorbidités préexistantes.

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    Commentaire

    Les complications thrombotiques artérielles et veineuses post Covid-19 ont été fréquentes et multiples et le sont encore mais à degré moindre. Il faut noter ce qui est important pour la pratique, 
    l'incidence reste élevée jusqu'à 49 semaines après le diagnostic de COVID-19, soit 1 an.  C'est à partir de " mois que nle risque thrombotique décline. Mail il n'est pas rare d'être confronté  avec des patients qui présentent une MTEV sans facteur déclenchant et qui font état d'une infection Covid-19 il y a 3 mois, 6 mois, 9 mois. Au delà de 3 mois peux t'-on mettre en relation la MTEV avec la Covid-19 ? Cette étude a plusieurs limites citées par les auteurs, néanmoins elle apporte des messages importants.

    Récemment en RCP THROMBOSE nous avons examiné différents cas de MTEV (TPV/EP) survenues à distance la Covid-19, à chaque fois des cas Covid étiquetés graves mais non sévères. La question était la suivante : ces patients  ne présentaient aucun facteur déclenchant autre que la Covid-19 avec des délais de 1 mois à 6 mois. Doit on considérer ces MTEV liées uniquement à la Covid-19 ? Quels marqueurs pourraient permettre de les relier ? Existe - t-il une stratification de la gravité de la Covid-19 qui pourrait expliquer des complications thrombotiques au delà de 3 mois ? 

    Bien entendu la vaccination limite considérablement le risque de Covid-19 et notamment de Covid-19 grave de plus nombre de traitements sont maintenant efficaces comme le Paxlovid et d'autres.

    La prévention de la MTEV n'est toujours pas complétement réglée mais on y parvient progressivement.

    Cet article : Helms, J., Middeldorp, S. & Spyropoulos, A.C. Thromboprophylaxis in critical care. Intensive Care Med (2022). https://doi.org/10.1007/s00134-022-06850-7 nous donne des recommandations claires en réanimation 
     
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    Dans l'attente de Covi-Dose, l'Arlésienne finra-t-elle par se dévoiler , le plus tôt possible, on l'espère. C'est au Congrès de la SFMV de Cannes , il ya 1 an , que l'on nous a promis que la publication était iminente. L'est-elle encore à l'approche du Congrès de la SFMV à Toulouse? 

    Une 8° vague arrive, saurons nous la juguler rapidement et avec efficacité ? On l'espère car nous avons appris des 7 vagues précédentes.....exact ????

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  • Entretien : les TVP distales

    Nouvelle rubrique :" les entretiens de #MedVascInfo",  avec......

    "La connaissance, c'est partager le savoir qui nous fait grandir."  Olivier Lockert

    "Savoir, c’est pouvoir ! C’est l’action qui détermine si la connaissance est certaine."  Swâmi Prâjnanpad


    "Le savoir que l’on ne complète pas chaque jour diminue tous les jours." Proverbe Chinois
    Il s'agira d'entretiens sur des questions sur la THROMBOSE  (Veineuse et Artérielle), sur la PANDEMIE,  avec des experts, dont l'expertise est unanimement reconnue.

    Le but est d'avoir leur vision sur des sujets qui font débat, voire qui sont à l'origine de controverses.
    Ces entretiens s'inscrivent dans le "PARTAGE du SAVOIR" , si important et si utile, avec le respect de la SCIENCE. Il s'agira d'interviews écrites, tout en laissant à l'expert la liberté totale de ses propos. L'interview classique orale sera pour un peu plus tard quand les problèmes techniques seront résolus

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    C'est le Dr Jean Philippe Galanaud , Médecin Vasculaire, qui inaugure cette nouvelle rubrique.


    Entretien  Thrombose veineuse distale avec le Dr. Jean Philippe Galanaud, Département de Médecine Sunnybrook Health Sciences Centre, Université de Toronto, Toronto, Canada



    Rappelons que le Dr Jean Philippe Galanaud a beaucoup travaillé  et  publié sur les TV Distales, il est donc le mieux placé pour répondre aux questions de #MedVascInfo . Crette thématique a été à l'origine de controverses, mais aujourd'hui cette question est consensuelle.

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    Question 1
    Jean Philippe peux-tu nous définir sur le plan anatomique les thromboses veineuses distales des membres inférieurs, de plus pourcentage entre TVP distale vs proximale

    D'un point de vue strictement anatomique, les veines distales englobent les veines jambières (tibiale postérieure, péronière, tibiale antérieure (Les thrombose tibiales antérieures sont exceptionnelles) et musculaires (soléaires et  gastrocnémiennes) ainsi que le tronc tibio péronier. D'un point de vue pratique, les TVP du tronc tibio péronier sont généralement considérées comme des TVP poplitées. Un peu plus de 50% des TVP isolées (sans embolie pulmonaire) des membres inférieurs sont des TVP distales

    Question 2
    Existe t il une différence quant à l histoire naturelle des TV musculaires et des TV jambières (hors cancer) , sexe, facteur déclenchant ou non, survenue d'une embolie pulmonaire

    Voilà une question à laquelle il est difficile de répondre. Des études cliniques, ont retrouvé un taux d’extension proximal très faible à trois mois (inférieur à 3 %) des TVP musculaires (vs. un taux généralement admis de 10% en cas de tvp distale tout venant), suggérant que le potentiel thrombo-embolique de celles-ci était inférieur à celui des thromboses jambières. Un essai thérapeutique publié par Schwartz en 2010 ne retrouvait pas de bénéfice à un traitement anticoagulant par HBPM pendant 10 jours, par rapport à une compression élastique seule en cas de TVP musculaire. Dans l’étude Cactus, en revanche, il n’y avait pas de différence significative entre le taux d’extension des thromboses jambières et musculaires, même si les thromboses jambières semblaient s’étendre un peu plus. Dans l’étude Optimev, le risque de récidive thrombo-embolique à l’arrêt du traitement ac était similaire entre thromboses jambières et musculaires. En pratique, dans les recommandations Inter sociétés, il n’est pas fait de distinction entre thromboses jambières et musculaires en terme de nécessité de traiter et de durée de traitement.

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    Question 3
    Le traitement anticoagulant des TVP distales symptomatiques (en dehors du cancer) est il différent selon leur localisation anatomique : molécule, dose, durée
     
    Comme mentionné précédemment, il n’est pas fait de distinguo entre les thromboses jambières et musculaire en terme de traitement dans les recommandations Inter sociétés. En revanche, le nombre de segments veineux thrombosés semble influencer le risque de récidive, et, en cas de thrombose multiples, il est suggéré de traiter trois mois plutôt que six semaines par anticoagulants. Les thromboses du tronc tibio-péronier, devraient quant à elle être traitées comme des thromboses poplités en raison de leur risque de récidive similaire à celui des thromboses poplités.Concernant le choix de la molécule, les anticoagulants oraux direct, à dose curative, même s’ils n’ont pas fait encore l’objet d’une évaluation par le biais d’un essai thérapeutique dédié, constituent le traitement de première intention.

    Question 4
    Le traitement anticoagulant des TVP distales symptomatiques au décours d'un cancer actif est il différent selon leur localisation anatomique : molécule, dose, durée

    L’étude Optimev a mis en évidence qu'en l absence de cancer le risque de récidive des thromboses distales était deux fois moindre qu’en cas de thrombose proximale et la majorité des récidives etaient de thromboses distales. En revanche, lorsque la thrombose distale survient au décours d’un cancer, le pronostic, en terme de récidive, de type de récidive et de mortalité est comparable à celui des TVP proximales chez les patients cancéreux. Aussi, en cas de thrombose distale chez un patient cancéreux, lorsque la thrombose survient en dehors de tout facteur transitoire surajouté, un traitement anticoagulant prolongé peut/doit être proposé si le risque hémorragique le permet et si c’est en accord avec le choix du patient. Le choix de la molécule est identique à celui que l’on prescrirait chez le même patient présentant une thrombose proximale. En cas de risque hémorragique, l’intensité du traitement anticoagulant peut et doit être adaptée de façon plus souple qu’en cas de TVP proximale.


    Question 5
    Quelle est la prise en charge des TVP distales asymptomatiques ?

    Dans la pratique clinique, en cas de découverte d’une thrombose distale asymptomatique, en l’absence de risque hémorragique, les patients sont généralement traités de la même manière que pour une thrombose symptomatique. L’élément modulateur principal du traitement des thromboses distales est le risque hémorragique. En cas de risque hémorragique élevé, une surveillance par écho-Doppler à une semaine plus ou mois 2 semaines doit être proposée. Un traitement à dose prophylactique, peut aussi être proposé, si le risque hémorragique le permet. Enfin, il ne faut pas déployer de filtre cave en cas de thrombose veineuse profonde distale et proposer une surveillance écho-Doppler

    Merci Jean Philippe pour avoir accepté de participé à ce premier entretien sur  #MedVascinfo avec des réponses claires et précises.
     
     
    Bibliographie 
    Galanaud JP, Quenet S, Rivron-Guillot K, Quere I, Sanchez Muñoz-Torrero JF, Tolosa C, Monreal M; RIETE INVESTIGATORS.
    Comparison of the clinical history of symptomatic isolated distal deep-vein thrombosis vs. proximal deep vein thrombosis in 11 086 patients J Thromb Haemost . 2009 Dec;7(12):2028-34.
    JP Galanaud ,MA SevestreC GentyJP LarocheV ZizkaI QuéréJL BossonOPTIMEV SFMV investigators,  Comparison of the clinical history of symptomatic isolated muscular calf vein thrombosis versus deep calf vein thrombosis, J Vasc Surg 2010;52:932-8.
    JP Galanaud, JL Bosson, I Quéré, Risk factors and early outcomes of patients with symptomatic distal vs. proximal deep-vein thrombosis,Curr Opin Pulm Med, 2011 Sep;17(5):387-91.
    J-P Galanaud
    S R KahnA Khau Van KienJ-P LarocheI Quéré, 
    Epidemiology and management of isolated distal deep venous thrombosis, Rev Med Interne,2012 Dec;33(12):678-85.
    Righini M, Galanaud JP, Guenneguez H, Brisot D, Diard A, Faisse P, Barrellier MT, Hamel-Desnos C, Jurus C, Pichot O, Martin M, Mazzolai L, Choquenet C, Accassat S, Robert-Ebadi H, Carrier M, Le Gal G, Mermilllod B, Laroche JP, Bounameaux H, Perrier A, Kahn SR, Quere I, 
    Anticoagulant therapy for symptomatic calf deep vein thrombosis (CACTUS): a randomised, double
    blind, placebo-controlled trial, Lancet Haematol . 2016 Dec;3(12):e556-e562.
    Robert-Ebadi H, Righini M.
    Should we diagnose and treat distal deep vein thrombosis?Hematology Am Soc Hematol Educ Program
    2017 Dec 8;2017(1):231-236.
    Kirkilesis G,  Kakkos SK,  Bicknell  C, Salim S, Kakavia  K 
    Treatment of distal deep vein thrombosis, Cochrane Database Syst Rev2020 Apr 9;4(4):CD013422.
    Quéré I, Glanaud JP, Sanchez O, Quelle est la prise en charge des thromboses veineuses profondes sous-poplitées ? Revue des Maladies Respiratoires 2021,38, e164-e170
     



     
     
  • Entretien avec Francis Couturaud : MTEV , durée du traitement
    “Quand les mouettes ont pied, il est temps de virer.” Proverbe Breton

    “C'était la Bretagne et seule cette province leur semblait capable de rivaliser avec la beauté sauvage de leurs îles.” Hervé Jaouen

    "L'essentiel est l'emploi de la vie, non sa durée." Sénèque

    Thème  : MTEV et durée du traitement anticoagulant
    La durée du traitement après un épisode de MTEV (EP/TVP)  est un problème quotidien en médecine vasculaire. Nous devons l'envisager en évaluant la balance bénéfice-risque, le risque de récidive et le risque hémorragique. Mais aussi on doit tenir compte des souhaits du patient. Il fallait donc avoir l'avis d'un expert sur cette question. Un grand merci à Francis Couturaud d'avoir accepté cet entretien afin de "baliser" cette décision.

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    Pr Francis Couturaud

    Département de Médecine Interne et Pneumologie, Centre Hospitalo-Universitaire de Brest, Brest, France
    EA 3878, INSERM CIC 1412, Université de Bretagne Occidentale, Brest, France
    FCRIN INNOVTE, France




    Question 1

    La durée du traitement anticoagulant en cas de MTEV (TVP et ou EP), est toujours une question difficile. De plus les patients sont soit pressés de stopper ou au contraire de poursuivre l’anticoagulation. Quels sont les circonstances où le traitement peut être stoppé rapidement de 6 semaines à 3/ 6 mois.

    Il s’agit des circonstances dans lesquelles le facteur déclenchant est majeur et transitoire : transitoire veut dire réversible, et majeur signifie que la « disparition » du facteur de risque dans le temps est associée à un risque de récidive si faible qu’il justifie un arrêt du traitement anticoagulant (maximum 6 mois). Ces facteurs sont : la chirurgie (avec anesthésie générale > 30 minutes), les traumatismes avec fracture ou plâtre, les alitements de plus de 3 jours pour affection médicale aiguë, le tout dans les 3 mois précédent la MTEV. En outre, en France, dans nos recommandations, nous avons aussi classé les facteurs hormonaux (pilule oestro-progestative, grossesse et post-partum, et traitement hormonal de la ménopause, dans les 3 mois précédent la MTEV) comme facteurs majeurs transitoires : en effet, si le risque d’un premier épisode de MTEV est modéré, en revanche, en termes de récidives, les conséquences sont MAJEURES. Les études sont abondantes sur le très faible risque de récidive dans ces contextes une fois l’exposition hormonale stoppée. Nos recommandations diffèrent ainsi du consensus européen (ESC/ERS).

    Question 2
    En cas de TVP proximale avec facteur déclenchant, en dehors des circonstances cliniques qui expliquent la TVP, dispose-t'on d’autres d’arguments pour prolonger la durée des anticoagulants : obstruction résiduelle, grosse jambe, D Dimères, thrombophilie, pathologie inflammatoire ?

    Ces facteurs ne sont pas associés à un risque indépendant accru de récidive et ils ne sauraient supplanter l’information déterminante apportée par la présence d’un facteur majeur transitoire ; ils ne peuvent donc pas conduire à prolonger le traitement au-delà de 3 ou 6 mois dans le contexte d’une TVP proximale provoquée par un facteur majeur transitoire. Pour mémoire, la recherche d’une thrombophilie n’est pas indiquée dans le cadre d’une TVP provoquée.

    Question 3
    En cas d’EP proximale avec facteur déclenchant, en dehors des circonstances cliniques qui expliquent l’EP, dispose-t-on d’autres d’arguments pour prolonger la durée des anticoagulants obstruction résiduelle, D Dimères, thrombophilie, pathologie inflammatoire, HTAP ou autres ?

    Excepté l’hypertension pulmonaire thrombo-embolique chronique, qui justifie formellement un traitement anticoagulant par AVK pour une durée non limitée (en plus de la prise en charge médicale ou chirurgicale spécifique), les autres facteurs (obstruction résiduelle, D-dimères, pathologie inflammatoire) ne sont pas associés à un risque suffisamment élevé pour justifier de prolonger le traitement dans le cadre d’une EP provoquée par un facteur majeur transitoire. Pour mémoire, la recherche d’une thrombophilie n’est pas indiquée dans le cadre d’une EP provoquée.


    Question 4

    La tentation de l’extension de l’anticoagulation par un AOD en cas de MTEV « idiopathique » ou « plus ou moins idiopathique » est une réalité. Bientôt les « LOW DOSE » vont supplanter les « FULL DOSE ». Peux tu préciser à la fois les indications possibles et les contre-indications de cette « LOW attitude thérapeutique »

    L’essai « RENOVE » (randomisation low- versus full-dose d’AOD), dont le recrutement est presque achevé (2500 patients inclus) adresse directement cette question majeure d’une LOW-DOSE chez des patients à haut risque de récidive. Dans l’attente de ces résultats, il faut bien se rappeler des critères d’inclusion dans les études EINSTEIN-CHOICE et AMPLIFY-extension : patients pour lesquels l’indication à prolonger le traitement au-delà de 6 mois est incertaine (en gros, 50/50 en faveur ou défaveur). Il ne s’agit donc pas de patients à très haut risque de récidive dans ces essais. En pratique, les patients éligibles à un traitement LOW-DOSE pour une durée non limitée sont ceux ayant un premier épisode de MTEV non provoquée par un facteur majeur transitoire, en l’absence de cancer, et sans critères de sévérité (EP à risque faible ou intermédiaire faible, TVP proximale jusqu’en fémorale) sont éligibles. Par contre, ne sont pas éligibles, car non inclus dans ces essais industriels, les patients avec EP à haut risque de décès, les MTEV non provoquées récidivantes ni les MTEV avec thrombophilie majeure (antithrombine, et encore moins les antiphospholipides où le recours aux AVK est à discuter notamment pour les triples positifs); de même, les patients avec EP à risque intermédiaire élevé ou thromboses ilio-caves sont sous représentés dans ces essais, dans ma pratique (hors essai thérapeutique), je ne leur propose pas la demi-dose.

    Question 5
    Quelles est la durée de l’anticoagulation en cas de CANCER et MTEV ?
    Sur la base des recommandations françaises, on poursuit le traitement tant que le cancer est actif (non en rémission ou cancer évolutif) et/ou tant qu’un traitement anticancéreux est nécessaire.

    Question 6

    En cas d’EP asymptomatique découverte sur un scanner au décours d’un cancer doit-on traiter ? Quel est le risque ? En cas de TVP de site inhabituelle (splanchnique, VS, VC…) découverte sur un scanner au décours d’un cancer adopte-t-on les mêmes recommandations pour l’anticoagulation. Enfin quelle anticoagulation pour les mêmes découvertes de MTEV asymptomatique mais en dehors du cancer

    Les EP fortuites (= EP non suspectées, qu’elles soient asymptomatiques ou non) dans le cancer sont traités de la même manière qu’une EP suspectée symptomatique dans le contexte du cancer ou hors cancer. Pour les thromboses veineuses profondes de localisation atypique, on traite selon les mêmes modalités qu’une thrombose de localisation « classique » (TVP membres inférieurs ou EP). Ceci dit, nous ne disposons d’aucune bonne étude sur le sujet. Dans ces situations, il est plus que jamais crucial de peser le risque thrombotique au regard du risque hémorragique (ex : thrombose ovarienne : il faut se concerter). Maître mot : décider à plusieurs !

    Enfin une MTEV asymptomatique hors cancer est traitée de la même façon qu’une MTEV symptomatique hors cancer.

    Question 7
    La durée de l’anticoagulation en termes de bénéfice risque tient compte du risque hémorragique et du risque de récidive. Ces deux risques sont différents selon les localisations de la MTEV, selon l’existence d’un cancer ou non. Selon toi peux-tu résumer les caractéristiques des patients à risque hémorragique majeur et ceux à risque de récidives majeurs ?

    Point crucial et difficile car certains facteurs sont à la fois des facteurs de récidive de MTEV et aussi des facteurs hémorragiques (ex : cancer, sujet âgé)

    Les patients à risque majeur de récidivesont les patients avec MTEV non provoquée récidivante, les EP non provoquées à haut risque de décès (on craint surtout le risque de décès par récidive ici), les MTEV non provoquées avec thrombophilie majeure (antiphospholipides et déficit en antithrombine) et les MTEV dans le contexte d’un cancer actif ou sous traitement anticancéreux.

    Les patients à très haut risque hémorragique sont les patients avec anémie (facteur majeur), les insuffisants rénaux, le cancer, les antécédents d’hémorragie sous traitement anticoagulant, l’âge (>75 ans notamment). D’autres paramètres sont à risque hémorragique grave comme l’hypertension artérielle non contrôlée. Dans le cancer, qui est aussi une circonstance à très haut risque de récidive de MTEV, certaines localisations saignent plus, quel que soit le type d’anticoagulant d’ailleurs (HBPM ou AOD) : cancer digestif haut (oeso-gastrique) et urologique (vessie), métastases cérébrales. Enfin certaines associations médicamenteuses augmentent le risque hémorragique : les antiagrégants, certaines chimiothérapies (anti-angiogéniques, anti-tyrosine kinase notamment).

    Merci Francis de tes réponses, toujours fondées sur les preuves. Merci aussi article après article, congrès après congrès d'accompagner la Médecine Vasculaire et de toujours répondre présent.
  • Entretien avec Grégoire Le Gal : la MTEV veineuse fait découvrir le cancer

    “Quand il lut quelque part que fumer pouvait provoquer le cancer, il arrêta de lire.” A Kirwan

    “Si il n'y avait pas la Science, combien d'entre nous pourraient profiter de leur cancer pendant plus de cinq ans ?” Pierre Desproges


    Thème : la MTEV veineuse fait découvrir le cancer

    Dans la pratique, la recherche d'un cancer en cas de MTEV sans facteur déclenchant  pose toujours de nombreux problèmes.

    Doit-on,trop en faire ou pas assez ?

    Quel est le juste milieux ? 

    J'ai donc demandé à Grégoire Le Gal , "un de nos cousins canadiens" de nous éclairer sur ce sujet.

    Merci d'avoir accepté Grégoire.


    leagalDr. Grégoire Le Gal MD PHD 
    Professor
    Department of Medicine, University of Ottawa
    Physician, Thrombosis Unit, Division of Hematology
    The Ottawa Hospital - General Campus
    Senior Scientist, Clinical Epidemiology Program
    Ottawa Hospital Research Institute



    QUESTION 1

    Grégoire pourrais-tu définir ce qu’est exactement une MTEV sans facteur déclenchant ?

    Malheureusement non, pas ‘exactement’. Certaines situations sont faciles à identifier. Une fracture de hanche récente traitée chirurgicalement est un facteur déclenchant évident, mais quid d’une arthroscopie en ambulatoire par exemple ? Par ailleurs, certains facteurs déclenchants telle que la période post-opératoire sont transitoires et réversibles, mais d’autres peuvent être persistants, comme un cancer ou une maladie inflammatoire chronique de l’intestin (MICI).

    L’ISTH propose de classer les évènements thrombotiques en trois catégories :
    1) provoqués par un facteur déclenchant transitoire « majeur » (chirurgie avec anesthésie générale de plus de 30 minutes, hospitalisation avec alitement d’au moins trois jours, césarienne), « mineur bien qu’important »(chirurgie avec anesthésie de moins de 30 minutes, hospitalisation courte, estrogénothérapie, grossesse ou post-partum, alitement à domicile, traumatisme des membres inférieurs avec mobilité réduite) ;
    2) provoqués par un facteur déclenchant persistant : cancer, MICI, anticorps antiphospholipides ; 3) les évènements non provoqués, sans facteur déclenchant.

    Mais comme vous le voyez, tout n’est pas noir ou blanc, et si certaines thromboses sont clairement non provoquées (« le coup de tonnerre dans un ciel bleu »), un jugement au cas par cas est indispensable.

    QUESTION 2

    Quel est le % de cancer retrouvé en cas de MTEV sans aucun facteur déclenchant ?

    On a longtemps pensé que le risque était de 10% à un an. Les essais randomisés récents ont rapporté des chiffres plus bas, de l’ordre de 5% de cancers occultes. Il est probable que dans les études de cohorte anciennes étaient comptabilisés des cancers qui étaient d’emblée apparents au moment du diagnostic de la thrombose.

    QUESTION 3

    La recherche d’un cancer dans le contexte de MTEV sans facteur déclenchant crée sas cesse la polémique. Il existe une grande distorsion entre les recommandations et la réalité du terrain. La tentation du scanner Thoraco Abdomino Pelvien est grande. Alors chez qui proposer cette recherche de cancer et comment ?

    L’essai randomisé canadien SOME (https://www.nejm.org/doi/full/10.1056/NEJMoa1506623) n’a pas montré de bénéfice du scanner abdomino-pelvien par rapport à un dépistage limité (examen clinique, biologie de routine, mise à jour des examens de dépistage recommandés pour l’âge et le sexe), ni sur le nombre de cancers diagnostiqués au moment du diagnostic, ni sur le risque de cancer au suivi. L’essai français MVTEP (https://clinicaltrials.gov/ct2/show/NCT04304651) a montré qu’un PET-scanner augmentait, mais de façon non statistiquement significative, le nombre de cancers diagnostiqués initialement. En revanche, le risque de cancer au cours du suivi était significativement plus faible dans le groupe des patients ayant eu un PET-scanner par rapport à ceux du groupe ayant eu un dépistage limité. Nous avons entrepris un nouvel essai clinique de plus grande ampleur pour évaluer l’intérêt du PET-scanner dans cette indication.

    Dans l’attente des résultats, les guides de pratique français et internationaux préconisent de réaliser un interrogatoire et un examen clinique complets, une biologie de routine et une analyse d’urine, une radiographie pulmonaire, et de mettre à jour les examens de dépistage habituels pour les cancers du sein, du col, de la prostate ou du colon.

    Un message important pour finir sur cette question : en pratique, nous sommes souvent très inquiets du risque de cancer chez les patients jeunes présentant une thrombose non provoquée (« pourquoi lui, sportif, en santé etc… »), alors que dans les études récentes, nous avons pu montrer que le risque de cancer était très faible chez les patients jeunes atteints de thrombose (moins de 1%), augmentait de façon assez nette à partir de 50 ans pour atteindre 9% chez les patients de plus de 80 ans. Nous devons donc être particulièrement vigilants chez les patients de plus de 50 ans.

    QUESTION 4

    En cas de cancer à l’origine d’une MTEV, ce cancer est-il évolué ou au stade occulte, en dehors des tableaux cliniques évolués de cancer.

    Dans les essais cités plus hauts, un tiers des cancers solides étaient diagnostiqués à un stage précoce (stade I/II) et deux tiers à un stade plus avancé (III/IV) sans différence significative entre les bras dépistage limité ou intensif. Il faut toutefois noter que quand bien même un dépistage intensif permettrait de diagnostiquer les cancers à un stade plus précoce, le bénéfice sur le pronostic resterait à démontrer. En effet, les études épidémiologiques montrent que la maladie thromboembolique est associée à une mortalité accrue chez les patients avec cancer, et que ceci est particulièrement vrai chez les patients avec un cancer localisé. Même en cas de cancer localisé, la thrombose est probablement la manifestation d’une maladie plus agressive.

    QUESTION 5

    Existe-t-il une valeur prédictive de cancer en fonction de la localisation initiale de la MTEV : TVP distale versus TVP proximale, EP proximale versus EP distale voire sous segmentaire

    Des études antérieures ont montré une association entre thrombose distale bilatérale et diagnostic ultérieur de cancer. Dans les essais de dépistage cités plus haut, le risque de cancer occulte était le même chez les patients avec TVP isolée, TVP et EP ou EP isolée. A noter toutefois que la plupart de ces études avaient exclu les patients avec thromboses distales isolées, et que l’information sur le caractère unilatéral ou bilatéral de la TVP, le caractère sous-segmentaire ou plus proximal de l’EP, n’était pas collectée. Ces points précis n’ont donc pas pu être analysés.

    QUESTION 6

    Une fois le cancer découvert, le patient est anticoagulé pour sa MTEV. Doit-on envisager alors une modification de ce traitement anticoagulant, selon le type de cancer, selon son évolution ?

    Oui. Sans rentrer dans les détails, car cela pourrait faire l’objet d’un entretien complet, la prise en charge de la maladie thromboembolique est bien sûr différente chez les patients avec cancer.

    Même si de plus en plus de patients peuvent être traités par AOD, le traitement par héparine de bas poids moléculaire au long cours est toujours indiqué dans certaines situations. Il existe aussi une indication à la poursuite du traitement anticoagulant tant que le cancer est actif et/ou que des traitements sont poursuivis (hormonothérapie…).

    Dans l’attente des résultats de l’essai français APICAT,nous manquons de données sur la réduction de la dose d’AOD après 6 mois chez les patients avec cancer.

    Etude APICAThttps://clinicaltrials.gov/ct2/show/NCT03692065?cond=API-CAT&draw=2&rank=1
    Etude MVPT : https://www.em-consulte.com/article/1029759

    Merci Grégoire pour la clarté ,la justesse de ton analyse et la pertinence de tes  réponses.

  • Entretien avec Isabelle Mahé : Thrombose et cancer

     

    "L'esprit humain est plus fort que tout ce qui peut lui arriver."  C.C. Scott

    « Trois idéaux ont éclairé ma route et m'ont souvent redonné le courage d'affronter la vie avec optimisme : la bonté, la beauté et la vérité. » Albert Einstein


    Thrombose et cancer : c'est au quotidien que nous sommes de plus en plus  concernés par cette association, une liaison dangereuse, dont il faut écarter tous les pièges. Qui est le mieux placé aujourd'hui pour décrypter cette thématique ? Isabelle Mahé a bien  voulu répondre à https://medvasc.info/. Merci Isabelle d'avoir accepté cet entretien.
     
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    Isabelle Mahé , Professeur des Universités, Praticien Hospitalier en Médecine Interne
    Chef du service de Médecine Interne, Hôpital Louis Mourier, APHP, Université Paris Cité
    INNOVTE-FCRIN, Cedex2 ,Saint Etienne



    Epidémiologie de la MTEV au cours du cancer actif et typologie (localisation, récurrence, risque hémorragique)

    Avec les progrès notables des traitements anticancéreux ces dernières années, l’espérance de vie des patients avec cancer s’allonge. Dans le même temps, et dans le contexte des progrès réalisés en imagerie, l’incidence des événements thromboemboliques veineux associés au cancer progresse, quel que soit le site du cancer. Dans une étude récente, le risque thromboembolique chez les patients avec cancer a été estimé à 9 fois celui des patients sans cancer.

    Le risque thromboembolique veineux dépend du site et du stade du cancer, mais aussi des caractéristiques du patient et des traitements du cancer. Ainsi, les cancers du pancréas, gastrique, du poumon et les tumeurs cérébrales sont les plus à risque thromboembolique en risque relatif ; mais en terme d’effectifs, les patients avec cancers du sein, de la prostate et colorectal, en raison de leur prévalence élevée et bien qu’à moindre risque relatif de thrombose, sont les plus nombreux des patients avec thrombose et cancer.

    Quel que soit le type de tumeur, la survenue d’un événement thromboembolique veineux est associée à un mauvais pronostic. Par ailleurs, après un premier épisode, sous traitement anticoagulant bien conduit, les patients avec cancer ont un risque majoré de développer une récidive veineuse thromboembolique et d’avoir des complications hémorragiques par rapport aux patients sans cancer.

    Pendant longtemps les HBPM ont été le traitement référence de la MTEV au cours du cancer depuis l’étude CLOT. Aujourd’hui les choses changent, les AOD ont le vent en poupe. Qu’apportent les AOD par rapport aux HBPM dans ce contexte ?

    Par rapport aux HBPM administrés au long cours par voie injectable, les AOD ont l’avantage de la voie orale. Les HBPM sont longtemps restées la seule alternative thérapeutique recommandée chez les patients atteints de thrombose et cancer. Désormais, 2 alternatives s’offrent au prescripteur et au patient, HBPM et AOD, qui ne sont pas exclusives, puisque l’une ou l’autre des options peut être privilégiée au cours du suivi du patient selon le contexte et les préférences, ce qui est très positif.

    Que reste-t-il des indications des HBPM en 2022 ?

    Les HBPM sont et restent une alternative de premier choix dans la prise en charge thérapeutique de la thrombose associée au cancer, comme cela a été rappelé dans la mise à jour des Recommandations Françaises en 2021 (https://doi.org/10.1016/j.rmr.2021.03.001).

    De plus, chez les patients avec une insuffisance rénale sévère, situation où les AOD sont contre-indiqués, les HBPM sont privilégiées (Recommandations Françaises 2021).

    La prévention de la MTEV au décours d’un cancer actif se pose régulièrement. Quelle est ta pratique à ce sujet ?

    Les patients avec cancer sont à risque thromboembolique veineux, à l’origine d’un surcroît de morbidité, de mortalité et de coûts de santé. Dans ce contexte, la thromboprophylaxie semble attractive.

    Bien que les HBPM aient démontré une efficacité par rapport au placebo dans la prévention du risque thromboembolique veineux chez les patients avec cancer recevant une chimiothérapie en ambulatoire, leur prescription systématique n’est pas recommandée compte tenu de la réduction modeste du risque de survenue d’événement thromboembolique veineux, du risque hémorragique et de la contrainte de la voie injectable.

    Plus récemment, les AOD ont été évalués prospectivement chez les patients avec cancer les plus à risque thromboembolique veineux (score de Khorana ≥2), mettant en évidence une réduction du risque thromboembolique veineux à 6 mois, au prix d’une augmentation significative du risque de saignements majeurs.

    En pratique, en dehors du cas du myélome qui justifie une prophylaxie, la thromboprophylaxie doit être discutée au cas par cas devant les cancers les plus thrombogènes, en l’absence de facteur de risque hémorragique.

    L’étude APICAT qui tu diriges est très attendue, peux-tu nous en rappeler la philosophie ?
    apicatcatcat
                                             
    Mahé I, et al. Thromb Haemost 2021.  doi: 10.1055/a-1647-9896

    Les essais thérapeutiques évaluant les différents schémas thérapeutiques d’anticoagulants chez des patients avec un cancer ont pour la plupart été menés avec une évaluation à 6 mois de l’événement index.

    Avec les progrès des traitements anticancéreux et des soins de support, près de 60% des patients pris en charge pour un événement thromboembolique veineux associé à un cancer sont encore vivants 6 mois plus tard. La question de leur traitement se pose alors.

    Après un épisode thromboembolique veineux dans un contexte de cancer, le risque de récidive est élevé, surtout dans les premières semaines suivant l’événement. Après 6 mois, ce risque persiste, même s’il est moins élevé que dans les 6 premiers mois alors que le risque hémorragique est significatif. Dans ce contexte, l'option d’une dose réduite d’anticoagulant semble attractive et justifie d'être évaluée prospectivement.

    L’objectif principal de l’étude API-CAT (étude prospective randomisée en double aveugle) est d’évaluer la non infériorité sur le risque de récidive thrombo-embolique veineux d’une dose réduite d’anticoagulant (apixaban 2.5 mg X2/j) par rapport à la dose pleine (5 mg X2/j) chez des patients avec cancer actif ayant reçu au moins 6 mois d’anticoagulant pour un événement thrombo-embolique veineux ; si cet objectif est atteint, la supériorité de la dose réduite sur le risque hémorragique sera recherchée. L’analyse sera stratifiée selon le site de cancer.

    A ce jour, plus de 1100 patients sur les 1722 patients attendus ont été inclus dans les 11 pays participant à l’étude.

    Les AOD présentent des interactions avec les traitements du cancer. Peux-tu nous rappeler les interactions les plus dangereuses. Existe-t-il un ou des  sites qui permettent en consultation lorsque que la prescription d’un AOD est possible d’éviter des associations à risque

    La question des interactions médicamenteuses entre AOD et anticancéreux est souvent évoquée. Elle peut s’envisager sous 2 angles ; le premier : peut-on attendre un effet de l’AOD sur l’effet antitumoral ? La réponse est non, il y a peu ou pas d’effet attendu de l’AOD sur l’effet du traitement antitumoral ; le deuxième : peut-on attendre un effet de l'anti tumoral sur l’effet de l’AOD ? La question se pose pour les traitements dont le métabolisme passe par le CYP3A4 et qui sont substrats de la P-gp. Dans la plupart des cas, l’intervalle thérapeutique large des AOD permet de ne pas anticiper d’impact clinique. La question reste posée pour les inhibiteurs/inducteurs puissants du 3A4 et de la P-gp, qui étaient des critères de non inclusion des essais thérapeutiques évaluant les AOD dans la thrombose associée au cancer. Il faut rappeler que pour ces situations, les données disponibles concernant les interactions n’ont pas été obtenues chez des patients.

    www.drugs.com

    https://cancer-<wbr< a=""> />druginteractions.org</wbr<>

    https://www.afsos.org/fiche-referentiel/prise-charge-de-maladie-thromboembolique-veineuse-cancerologie/

    Les nouveaux AOD arrivent. Est-ce que les Anti XI par exemple ont été testés pour traiter la MTEV dans le cancer ou la prévenir ?

    Les anti XI semblent avoir un profil intéressant : en agissant au niveau du facteur XI, ces traitements permettent de prévenir le risque thromboembolique tout en minimisant le risque hémorragique.

    A ce jour des données sont disponibles dans la prévention du risque thromboembolique dans la chirurgie du genou et la prévention du risque cardio-embolique dans la fibrillation auriculaire.

    Un tel profil semble particulièrement attractif dans la prise en charge de la maladie veineuse thromboembolique associée au cancer. Des études prospectives randomisées sont sur le point de débuter en France dans la prise en charge initiale de la thrombose associée au cancer, avec un suivi à 6 mois.

    Merci à Isabelle Mahé, des réponses claires, pour une meilleure connaissance sur THROMBOSE et CANCER, avec des retombées pratiques précieuses.

  • Entretien avec l'autrice Géraldine Poénou (Hgie/Cancer/MTEV)
    "Quand il lut quelque part que fumer pouvait provoquer le cancer, il arrêta de lire." A Kirwan

    « Presque tous les hommes meurent de leurs remèdes et non pas de leurs maladies. » MOLIÈRE (1622-1673), Le Malade imaginaire 


    Entretien  ave Géraldine Poénou à propos de l'article 
    ( inCancers 2022, 14, 1937. https://doi.org/10.3390/cancers14081937 

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    Le point de départ :

    Les patients présentant des événements thromboemboliques veineux dans le cadre d'un cancer relèvent d’un traitement anticoagulant (quand il est possible)  tant que le cancer est actif. De plus, malheureusement le cancer actif est autant un facteur de risque de récurrence d’événements thromboemboliques veineux qu’un facteur de risque hémorragique sous anticoagulant. Par conséquent, une stratégie d'anticoagulation sur mesure doit reposer sur une évaluation individualisée des risques de récidive thromboembolique veineuse et d'hémorragie associée aux anticoagulants. Aucun modèle d'évaluation des risques existant pour le risque de saignement associé aux anticoagulants n'a été validé pour la thrombose associée au cancer.

    Pour obtenir un meilleur modèle d'évaluation des risques, il semble nécessaire de se poser plusieurs questions que l'on a directement posé à Géraldine 

    1624728999341


    Dr Géraldine Poénou

    @zudenstein
    Assistante spécialiste en médecine vasculaire et thérapeutique 
    (Pr Laurent Bertoletti)

    Service de Médecine Interne, Hôpital Louis Mourier, APHP Paris, Colombes
    (Pr Isabelle Mahé) 





    Tout d’abord félicitations à toute l’équipe du Pr Isabelle Mahé pour cet article passionnant et très utile car il met en évidence des points majeurs sur l’anticoagulation de la MTEV au cours du cancer et notamment sur le risque hémorragique.

    Le résumé graphique de l'article est hautement pertinent et didactique

    peon2

    Alors première question : quelles sont les particularités du risque hémorragique, durant l’anticoagulation d’une MTEV au décours d’un cancer actif ?

    Merci pour les félicitations, nous sommes tous très heureux des retours positifs que nous avons pour l’article ! Je pense que le plus important dans notre approche est que nous avons tenu à recentrer la question autours du patient : « Qu’est qui rend un patient souffrant de cancer ayant une MVTE sous anticoagulant plus à risque hémorragiquequ’un autre patient ? ». En se posant la question de cette façon cela force à se pencher, tout d’abord sur les caractéristiques intrinsèques du patient puis sa relation avec son environnement notamment thérapeutique.

    Les caractéristiques intrinsèques du patient regroupent sa balance risque thrombotique/ risque hémorragique constitutionnelle propre à ce dernier (âge, situation à risques hémorragiques, insuffisance d’organe…) ainsi que les caractéristiques liées à son cancer (site, type, métastase…). Ces facteurs de risques sont immuables et doivent être recherché de manière systématique.

    En association aux deux caractéristiques sus citées, il est important d’ajouter l’influence des traitements anticoagulant d’une part et des traitements anti cancéreux d’autre part. En effet, la sensibilité à certains traitements, ses propriétés pharmacologiques, sa toxicité et ses interactions médicamenteuses influent sur le risque hémorragique.

    Si deux aspects sont systématiquement à évaluer chez tout patient ayant une MVTE (sa balance hémorragie/thrombose et son type de traitement anticoagulant) les particularités de notre patient dans cette situation est qu’il est nécessaire de prendre en compte aussi de manière de manière simultanée les caractéristiques liées à son cancer et l’impact de son traitement anticancéreux.

    pen55


    Le risque hémorragique dans ce contexte est il supérieur ou inférieur au risque de récidive de la MTEV ?

    Cette question à une réponse variable au cours du temps. D’après la littérature, chez un patient ayant une MTEV ce que l’on sait c’est qu’au moment du diagnostic risque de récidive et risque hémorragique sont égaux. Mais là où le risque de récidive diminue au fil des mois, le risque hémorragique reste constant sous anticoagulant et devient donc supérieur. C’est sur ce raisonnement qu’après la phase initiale de traitement, il est proposé une demi-dose en prévention des récidives de MVTE en population général. La même cinétique est observée chez les patients atteints de cancer. D’où l’idée de l’essai randomisé contrôlé international APICAT du Professeur Isabelle MAHÉ qui j’espère avec la participation active de tous permettra une limitation des expositions évitables à un surrisque hémorragique.

    Dans cet article les différents scores de risque hémorragiques sont passés en revue. Pour mémoire il n’existe qu’un score de risque hémorragique Cancer et MTEV associé le score CAT-BLEED. Nous savons toutes et tous que les scores ont des limités ce que souligne la littérature et que le score parfait n’existe pas. Les items des scores sont plus pertinents. Alors quels seraient les paramètres les plus utiles dans la pratique quotidienne pour évaluer le risque hémorragique, en cas de MTEV/Cancer actif ?

    Question difficile !La liste des facteurs influençant le risque hémorragique est longue voir fastidieuse pour une pratique en routine. Dans un monde idéal, il faudrait arriver à développer pour la pratique quotidienne une évaluation de la balance risque thrombotique/ risque hémorragiquerespectant la balance bénéficie/risque.

    Cela passera potentiellement par l’intégration de nouveaux outils faciles d’emploi comme des biomarqueurs pour évaluer l’ensemble des éléments de l’équation « à quel risque hémorragique nous exposons les patients ? ».

    Ce risque hémorragique est différent selon le type de cancer, sa localisation, les traitements du cancer et le traitement anticoagulant. Cette notion est très importante. Sans caricaturer le sujet quels sont les directions majeures à retenir des quatre questions : WHOM ? HOW ? WHAT ? WHEN ?

    WHOM ? => Comprendre qu’un patient cancéreux est à plus haut risque hémorragique et thrombotique que la population générale et donc doit être traité à part.

    HOW? => Se rappeler qu’il est plus complexe dans sa prise en charge. Nous nous devons de trouver un moyen d’évaluer de manière globale l’addition des facteurs à prendre en compte.

    WHAT? => Parler et mesurer la même chose. Nous nous devons de nous appuyer sur les critères tel que défini par l’ISTH pour parler d’hémorragie majeure, ou non majeure mais cliniquement pertinente.

    WHEN? => Après 6 mois pour être plus bénéfique qu’à risque. La chose que nous souhaitons le plus en tant que médecin c’est d’abord le primum non nocere, il ne faut pas évaluer le traitement alors que ça non-prescription entrainerait une forte probabilité de décès. C’est après 6 mois de traitement, lorsque le risque de récidive est au plus bas, que l’évaluation prend tout son intérêt.

    Compte tenu des bases de données sur cette thématique majeure, est ce que l’Intelligence Artificielle (Machine Learning) pourrait être d’une aide efficace ?

    OUI ! L’individualisation ou personnalisation d’un traitement ne peut être que plus efficace via l’Intelligence Artificielle

    Merci pour cet article qui pose les bonnes questions. Le réponses ne sont pas toutes au rendez-vous, la question du traitement anticoagulant devrait avancer avec les résultats de l’étude APICAT et d’autres.

    Merci à toi Géraldine de nous avoir éclairé sur un sujet "délicat" auquel les médecins vasculaires sont confrontrés au quotidien.

    Les RCP ONCO-THROMBOSE  pour ces cas difficiles sont d'un grande aide. 
     
  • Entretien avec Marc Carrier : COVID-19 et MTEV
    "Le Canada est délimité au nord par l'or, à l'ouest par l'orient, à l'est par l'histoire et au sud par des amis" Frances Shelley Wees

    « Advance - Ottawa - en Avant ». Devise de la ville d'Ottawa


    Entretien avec Marc Carrier :
    Senior Scientist, Clinical Epidemiology Program
    Ottawa Hospital Research Institute
    Chief, Division of Hematology, Department of Medicine
    The Ottawa Hospital
    Professor, Department of Medicine
    University of Ottawa

    07GNHkhA
    Marc Carrier est un éminenent spécialiste sur le maladie Vieneuse thrombo Embolique.
    Il a publié entre 2011 et 2021 , 210 articles sur cette thématique dans les revues les plus prestigieuse.
    Cet entretien est centré sur la MTEV et la Covid-19
     
    Merci Marc , un grand Merci d'avoir répondu à mes questions et en francais


    L’orage cytokinique qui est présent chez les patients Covid-19 en réanimation, comment est-il un activateur des phénomènes thrombotiques ?

    Excellente question. Je crois que l’entrée du virus dans la cellule endothéliale (exposition de facteur tissulaire), la cascade inflammatoire (relâche de cytokines) et l’orage cytokinique (activation du complément) sont tous des activateurs inter-reliés qui contribuent à la formation de thrombine, le dépôt de fibrine et les phénomènes thrombotiques.

    Anticipating and managing coagulopathy and thrombotic manifestations of severe COVID-19 - PubMed (nih.gov)

     

    A votre avis si la prévention par héparine de bas poids moléculaire est le médicament de la prévention de la maladie thrombo embolique en réanimation au décours de la Covid-19, à quelle dose ? Préventive ? Intermédiaire ? Ou curative ?

    Pour l’instant, les données probantes semblent suggérer que les HBPM à dose préventive devraient être utilisées chez les patients en réanimation pour Covid-19. L’essai multi-plateforme randomisé (mRCT) qui a randomisé les patients avec Covid-19 en réanimation entre une dose d’héparine (majorité HBPM) thérapeutique et une dose standard (intermédiaire et préventive) n’a pas démontré de bénéfices sur le critère de jugement primaire de “Organ-support free days ». Les taux d’évènements thrombotiques (artériels et veineux) étaient moins élevés chez les patients recevant des dose thérapeutiques (5.7% vs. 10.3%) mais sans diminution de la morbidité et la mortalité. La prévention primaire à dose thérapeutique est aussi associée à une augmentation du risque hémorragique de 1.3% (définition de l’ISTH). L’étude iranienne INSPIRATION nous donne quelques indices pour décider entre une dose préventive et intermédiaire chez les patients en réanimation. Une dose intermédiaire n’a pas diminué le risque de survenue du critère de jugement principal (thromboses artérielles et veineuses, mortalité et traitement d’oxygénation extracorporelle) mais semble augmenter le risque hémorragique (définition de BARC; 2.5 vs 1.4%). Il y a donc peu de données randomisées en faveur d’une dose thérapeutique ou intermédiaire chez les patients Covid-19 en réanimation.

    https://www.medrxiv.org/content/10.1101/2021.03.10.21252749v1
    https://jamanetwork.com/journals/jama/fullarticle/2777829

    Pensez-vous que les anticoagulants oraux directs aient une place dans la prévention de la maladie thrombo embolique, chez les patients Covid-19 hospitalisés mais non en réanimation ?

    Il y a plusieurs essais en cours et nous aurons peut-être une perspective différente dans les prochaines semaines ou mois. Pour l’instant l’étude ACTION, qui a comparé le rivaroxaban à une dose de 20 mg par jour (patients hospitalisés stables et au long cours (30 jours)) et l’énoxaparine 1 mg/kg BID (patients en réanimation) à une dose préventive (énoxaparine 40 mg par jour) pendant l’hospitalisation, n’a pas démontré de bénéfices mais une augmentation du risque hémorragique. Donc, pour l’instant, je ne crois pas que les anticoagulants oraux directs aient une place mais des études pré- et post-hospitalisation sont en cours et les données pourraient changer notre prise en charge. Il est possible que les héparines (HBPM ou non-fractionnée) puissent avoir d’autres fonctions (ex. diminution de l’entrée du virus, etc.) qui pourraient avoir des bénéfices chez les patients hospitalisés avec Covid-19

    Pensez-vous que les D Dimères chez les patients hospitalisés en médecine et ou en réanimation en cas de Covid-10 puissent aider à moduler la gestion de la prévention de la thrombose en ce qui concerne sa posologie ?

    Plusieurs études et essais en cours utilisent différents biomarqueurs (incluant les D-dimères) afin de stratifier les patients hospitalisés avec la Covid-19. Donc nous aurons plus d’information dans les prochains mois.

    Au début de la pandémie, les niveaux élevés des D-dimères chez les patients hospitalisés semblaient être associés à une coagulopathie spécifique à la Covid-19. Maintenant, nous savons que les D-dimères peuvent être générés dans l’espace alvéolaire. L’écoulement de protéines plasmatiques (afin d’activer les cytokines) contient aussi de la thrombine et du fibrinogène qui éventuellement sera dégradé en D-dimères. Donc les D-dimères pourraient être un facteur pronostique de détérioration pulmonaire (et de mortalité) plutôt que d’un risque thrombo-embolique ou vasculaire.

    L’essai mRCT n’a pas rapporté de différences importantes dans les odds-ratio favorisant une dose thérapeutique plutôt qu’une dose standard chez les patients hospitalisés (mais pas en réanimation) qui avaient des D-dimères élevés (2X la limite de la normale) ou non. Les odds ratios pour le critère de jugement principal (voir question 2) étaient de 1.3 (probabilité de 97%) et 1.2 (probabilité de 92%) chez les patients hospitalisés avec la Covid-19 (mais pas en réanimation) avec des D-dimères élevés ou non, respectivement. Donc pour l’instant, les données probantes semblent démontrer que les D-dimères ne sont pas très importants pour moduler la gestion de la thrombose chez les patients hospitalisés avec la Covid-19.

    https://www.medrxiv.org/content/10.1101/2021.05.13.21256846v1

    A. Khorana a évoqué dans un article du JTH, qu’il existait des ressemblances entre le Cancer et la Covid-19 en matière de maladie thrombo embolique veineuse, les 2 CC. Qu’en pensez-vous ?

    Comme je suis un des auteurs de la publication, je suis un peu biaisé. Le but était de réviser la pathophysiologie de ces deux maladies pro-thrombo emboliques en donnant une perspective différente afin de générer une discussion et un débat. Je crois, en effet, qu’il y a des ressemblances intéressantes. Le risque thrombotique est élevé, les d-dimères sont très élevés et possiblement associé à un mauvais pronostic et la prévention primaire à dose de prophylactique semble insuffisante. Cependant, les différences entre les deux maladies (Cancer et COVID) permettent aussi aux cliniciens de réfléchir à la pathophysiologie sous-jacente et d’établir une prise en charge optimale afin de prévenir la malade thromboembolique chez ces patients. Je vous encourage à lire l’article :

    https://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/jth.15294

    Avez-vous été confronté dans votre pratique à des thromboses veineuses classiques, thrombose veineuse profonde des membres, thrombose veineuse superficielle et/ou embolie pulmonaire post vaccination anti Covid-19 et avec quel vaccin ?

    C’est une excellente question. Comme la vaccination s’est accélérée dans les derniers mois au Canada, toutes les nouvelles TVP, thromboses superficielles et EP sont diagnostiquées chez des patients ayant récemment reçu la vaccination (Pfizer, Moderna et Astra-Zeneca). Cependant, nous avons eu quelques cas de thromboembolies veineuses dans le contexte de thrombocytopénie thrombotique associée au vaccin Astra-Zeneca. Tous les patients avaient des anticorps anti-PF4 positifs. Les immunoglobulines polyvalentes, les échanges plasmatiques et l’argatroban ont été utilisés avec succès dans la prise en charge de ces patients. Une série de cas Canadiens sera bientôt publiée afin de partager notre expérience clinique. Ce vaccin n’est plus utilisé au Canada et donc, nous avons eu aucun cas dans les dernières semaines.

    MERCI

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     Une penseé pour Cleave Kearon

     
  • EP : obstruction résiduelle
    Commentaire de Grégoire Le Gal
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